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6 février 2018 2 06 /02 /février /2018 08:42
"Regard vers l'intérieur" - huile sur toile - 80 x 80 cm - 2008

"Regard vers l'intérieur" - huile sur toile - 80 x 80 cm - 2008

Qu’il est doux de croire

 

 

           Liberté ! Ils n’ont que ce mot à la bouche. Ils le proclament et le vocifèrent. Qu’ils s’élancent sur les barricades au péril de leur vie ou qu’ils croupissent dans d’obscures geôles où l’on relègue les réfractaires, les irréductibles à tout y compris au système et à son contraire l’affirment avec véhémence : « Je suis libre et c’est librement que je m’affirme. Envers et contre tous ! En prenant tous les risques ! Et je ne me laisserai pas faire…Vous n’aurez pas le dernier mot ! Non mais…

           Pourtant le teigneux que je suis, le maniaque du cheveu coupé en quatre, le raisonneur invétéré, celui qui ne veut pas se laisser beurrer la tartine a malgré tout sa petite opinion et il y tient. Laissez-moi vous expliquer.

           Et si tout cela reposait sur un simple malentendu ? Sur une illusion d’optique ? Ou un simple moyen de se raccrocher aux branches ? Hélas la preuve est indubitable, l’évidence absolue de ma liberté réside, selon le bon sens populaire, dans le fait indéniable que je peux faire des choix. Choisir, donc faire preuve d’autonomie, ne pas être irrémédiablement guidé pour ne pas dire téléguidé.

           Certes mes choix portent souvent sur des futilités. Vais-je préférer la sauce béchamel à celle plus corsée au poivre vert ? Vais-je aller voir quelque sottise distrayante dans une salle obscure pour me payer du bon temps ? Vais-je préférer «  Les bronzés font du ski » au Bergman le plus métaphysique ? Car là je peux décider en toute liberté. En toute liberté ? Mon œil...

           Revenons-en à l’instant précédent, celui où le choix s’est fait. Celui où j’ai décidé librement de ne pas rigoler à cette brève de comptoir vulgaire mais décontractante. Celui où j’ai préféré m’insurger contre l’arrogance de l’élu qui défend sa position dominante indiscutable en niant les faits les plus avérés. Non ,il n’a pas fait pression sur des personnes subalternes, de surcroît féminines en niant le harcèlement sexuel qu’il leur a fait subir. D’ailleurs elles le méritaient bien…On n’a pas idée d’être aussi naïves et peu au fait du pouvoir du prince.

                                                                                                   A suivre

 

 

 

"Regard vers l'intérieur" - détails

"Regard vers l'intérieur" - détails

376 - Qu'il est doux de croire
376 - Qu'il est doux de croire

La suite

vous en apprendra 

un peu plus espérons-le.

D'ici là, dormez en paix braves gens

TOUT EST SOUS CONTRÔLE ET PARFAITEMENT MAITRISE !

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30 janvier 2018 2 30 /01 /janvier /2018 09:22
"Dali dans l'eau" - peinture à l'huile - 100 x 81 cm - 2008

"Dali dans l'eau" - peinture à l'huile - 100 x 81 cm - 2008

Crue et décrue

 

         La Seine n’en finit plus de monter. Déjà un record historique est battu, celui des précipitations pluvieuses en cette époque de l’année. Pourtant cela s’est fait avec une sage lenteur mais avec persévérance et obstination. Le zouave du pont de l’Alma qui en a vu d’autres a les genoux humides en attendant mieux.

           Et pourtant beaucoup a été fait depuis la crue historique de 1910, celle dont on se souvenait encore dans les familles quand pépé Louis se remémorait ce passé pour lui émouvant. C’est que le fleuve y avait mis du sien, envahissant rues et ruelles, submergeant les quais et les plus lointains alentours. Menaçant même le métropolitain fleuron d’un irrémédiable progrès, celui que rien n’arrête et dont l’apogée devait faire fleurir notre avenir à tout jamais.

           Et on y croyait dur comme fer sans voir arriver la Grande Guerre qui allait tout remettre en cause et commencer à miner nos illusions humanitaires. La suite on la connaît et je ne m’étendrai pas sur les turpitudes d’un 20ème siècle enragé d’idéalisme et prêt à tout pour faire triompher la rationalité de l’intellect humain. Tout ? Tout et son contraire, la fin justifiant les moyens et les lendemains qui chantent méritant bien quelques menus sacrifices dont deux guerres mondiales et une multitude d’autres conflits, guérillas et putschs révolutionnaires entraînant d’autres soulèvements tout aussi légitimes.

           Mais la Seine monte malgré les aménagements de grande ampleur réalisés pour anticiper la progression des flots en amont et en aval de la capitale. Drainage, bassins de retenue, déviations des flux liquides. Tout cela est utile et nous préserve du pire mais se révèle insuffisant quand la nature se livre à des excès bien peu raisonnables.

           Pourtant la météorologie a fait d’énormes progrès. Des sondes, des antennes nous renseignent en permanence sur les mouvements atmosphériques de grande ampleur. Des images prises par des satellites nous montrent en direct les flux et les reflux, les vortex et les anticyclones qui des Açores aux confins de l’Europe centrale entraînent le temps qu’il fait dans leurs volutes et leurs enchaînements. Mais réchauffement climatique oblige, les données étant sans cesse nouvelles et évolutives, les prévisions deviennent quelque peu aléatoires. On a beau multiplier les mesures et les prévisions statistiques on n’arrive pas à tout intégrer dans un prévisible rassurant.

           Mais la Seine continue de monter avant de redescendre comme il se doit. Le problème est qu’on ne sait pas encore trop à quel moment ni à quel rythme. C’est un peu comme si elle voulait nous signifier le peu de cas qu’elle fait de nos prévisions et aménagements. Pourtant Pompidou avait fait très fort en créant ses voies sur berges. Enfin c’en était fini des flâneurs, clochards et autres irresponsables qui hantaient les rives du fleuve. Place au progrès et à la célérité des déplacements. Paris s’ouvrait à un flux incessant le traversant de part en part et reliant les extrémités dans un élan grandiose. Enfin les taxis pouvaient atteindre la gare de Lyon  dans un flux harmonieux, libre des feux rouges et autres incongruités. Enfin on ne risquerait plus de rater son TGV pour cause de bouchon intempestif et ce faisant de ne pouvoir atteindre la Côte d’Azur dans des délais optimums permis par un irrésistible progrès. Enfin le rêve de tout retraité bien nanti pourrait se réaliser alternant la vie de l’esprit dans la capitale et la douceur de vivre dans un climat plus propice en hiver. Le farniente pour tous sur des rivages azuréens si proches et si lointains. Si chers à nos âmes après une vie de dur labeur au service de quelque administration centralisée, une vie de bureau bien remplie au service de tous, ayants-droit ou pas, intégrés ou non dans une activité rémunératrice. Couverts par la sécu ou sans papiers issus de zones lointaines aux confins de la civilisation. Débarqués en Italie, regroupés à Calais ou ailleurs dans cette Europe accueillante pour la misère du monde quand elle reste dans les limites de la décence et qu’elle est propre sur sa personne.

           Mais la Seine va décroître. Sagement elle va regagner son lit parce qu’il est l’heure de se montrer raisonnable. Avec diligence les services compétents vont tout remettre en ordre, tout éponger et ramasser les débris échoués. Et le monde va retrouver son rythme. Tout va redevenir normal. Le trafic automobile et ses bouchons coutumiers. Le RER et ses horaires négociables pour cause de travaux ou par la présence de personnes suspectes le long des voies, à moins qu’un désespéré n’ait fait des siennes ou qu’un employé irréprochable par ailleurs ait été terrassé par un infarctus sans prendre soin de prévenir... L’effervescence de la gare St Lazare à ses heures de pointe va retrouver son rythme journalier. Flux et reflux vont se croiser aux heures de pointe. Et le métro va accueillir tout ce monde coutumier dans la douce chaleur de ses entrailles pour les porter aux quatre coins de la capitale et rayonner au-delà des banlieues. Puis au-delà dans le vaste monde, celui où nous vivons, où nous avons nos petites habitudes celles qui font chaud au cœur en attendant de se retrouver la semaine prochaine.

 

                                                     Le Chesnay le28 janvier 2018

                                                     Copyright Christian Lepère

 

"Dali dans l'eau" - détails

"Dali dans l'eau" - détails

375 - Crue et décrue
375 - Crue et décrue

L'eau se répand puis redescend

et la marée depuis toujours

fait de même...

C'est sa mission.

Et c'est sa raison d'être.

Mais que faisons-nous d'autre sur cette planète?

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23 janvier 2018 2 23 /01 /janvier /2018 08:13
Sans titre - Gravure à l'eau-forte - format demi-Jésus - 1965 (?)

Sans titre - Gravure à l'eau-forte - format demi-Jésus - 1965 (?)

Bruine et brouillard

 

           Inlassablement la pluie s’égoutte et depuis tant de temps l’eau ruisselle sur le pare-brise. De gauche à droite, inversement et sans arrêt, grinçant et peinant les balais d’essuie-glace tentent d’accomplir leur mission. Mais c’est très dur car cette pluie qui n’ose pas dire son nom s’obstine à mouiller, sans plus…De la bruine au crachin elle passe par des averses un peu plus convaincantes mais toujours sans hâte, sans insister.

           C’est comme pour le ciel. D’un gris moyen ni trop foncé ni sujet à de modestes éclaircies, il s’obstine dans des valeurs neutres. Ennui attristant qui perdure.

           Et le paysage défile tout trempé et dégoulinant. La verdure verdoie dans l’herbe des bas-côtés mais les arbres morts de l’hiver n’y participent guère. Enfin il reste des feuillages d’automne mais sans le moindre éclairage furtif. Tout s’obstine dans des couleurs neutres. Du gris, du brun, du désolant. Du pourri et du spongieux à perte de vue.

           En traversant un village une rue barrée pour travaux m’expédie dans une déviation interminable. Très vite ça n’est plus fléché et voici qu’après avoir quitté la vallée de la Seine je me retrouve sur la Route des Crêtes. Du moins ce que l’on nomme ainsi car l’altitude est modeste et le plateau peu accidenté. Je traverse le vaste terrain surplombant le fleuve qui a creusé son lit un peu plus bas en prenant son temps et en sinuant entre les lignes du terrain depuis d’antiques époques dont la mémoire humaine ne garde plus le souvenir.

           Et maintenant c’est le brouillard. Plus ou moins dense et ouaté on s’y enfonce comme dans un mol édredon, une porte ouverte sur l’amnésie. Va-t-on en ressortir avant la fin des temps ? Mais soudain un carrefour surgit. Enfin une autre route sur laquelle on bute et qui part à droite et à gauche. La main de l’homme a laissé un signe et donné une indication. Oui ! C’est bien à gauche qu’est la Roche-Guyon.  La descente s’amorce, quelques virages s’enchaînent et c’est le retour au monde. Celui où séjournent nos semblables. Derrière des façades dégoulinant de pluie se trouvent des hommes, des femmes et des bambins. Peut-être sont-ils en train de déjeuner à cette heure ? A moins qu’une sieste réparatrice ne les accueille dans son repos ?

           Allons, je vais quand même arriver dans des délais acceptables chez mes hôtes et me retrouver en bonne et chaude compagnie. Le monde des songes qui m’avait happé en m’entraînant derrière ses voiles m’a accordé une échappée. L’entre-deux monde m’a libéré mais pour combien de temps encore ? Car c’est bien là toute la question. Celle à laquelle nul ne saurait répondre.

 

                                                                Le Chesnay le 22 janvier 2018

                                                                Copyright Christian Lepère

Sans titre - Gravure à l'eau-forte imprimée sur papier Arches - Format Demi-Jésus - 1965 (?)

Sans titre - Gravure à l'eau-forte imprimée sur papier Arches - Format Demi-Jésus - 1965 (?)

Après cette petite incursion 

dans les limbes

voyons

la suite 

va nous conduire.

Affaire à suivre si le cœur vous en dit...

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15 janvier 2018 1 15 /01 /janvier /2018 12:45
"Babel au fil du temps" - huile sur toile - 75 x 54 cm - 1998

"Babel au fil du temps" - huile sur toile - 75 x 54 cm - 1998

Echec et mat

 

           Revenant de Paris par mon train de banlieue habituel je m’apprêtais à faire chauffer ma soupe. Le téléphone sonne. C’est mon fils facteur en Ardèche. Grâce à la vie campagnarde qu’il mène, il a du temps pour se livrer à des réflexions sur le monde et sur son évolution. Avec l’aide d’internet il y arrive.

           Depuis peu il s’intéresse aux échecs. Non pas aux énormes possibilités de stratégie offertes par les 64 cases, mais plutôt à toutes les significations sociales et symboliques de ce jeu. Sans oublier tout ce qui motive les champions à améliorer leurs performances. Il s’agit donc d’une vue critique de ce passe-temps pour intellectuels fiers de l’être.

           On connaît les motivations du joueur : vaincre l’adversaire en prouvant sa supériorité conceptuelle. C’est donc une affaire de pouvoir se devant de relever tous les défis. Pour le champion mondial, très au-dessus de la mêlée, il ne restait en dernier recours qu’un combat pour prouver sa supériorité,  se battre contre l’ordinateur. Ce qui fût fait dès la fin des années 90. Kasparov alors maître du jeu échoua. La machine l’avait vaincu. Puis ce fût le tour de Kramnik.

           Dès lors les ordinateurs voyant leur puissance s’accroître de façon exponentielle et la complexité de leurs logiciels s’améliorer sans cesse il devenait évident que l’homme était mis hors-jeu. Ce qui ne prouve nullement une intelligence supérieure de la part de la machine. Car elle est stupide et mécanique à souhait. Sa supériorité réside dans l’invraisemblable vitesse et capacité de calcul au niveau électronique. L’ordinateur est un imbécile effroyablement rapide. Il remplace toute recherche intelligente par la comparaison systématique de toutes les possibilités. Du moins si l’intelligence qui l’a conçu lui a fourni les logiciels les mieux adaptés. Car le programmateur peut, lui, être intelligent et avisé.

           Jusque- là tout résidait dans la puissance de calcul qui peut être améliorée indéfiniment en accroissant la taille et la finesse des circuits et surtout en faisant travailler des machines en bandes organisées. Et cela au niveau mondial et en temps réel.

           Mais le progrès n’est pas que linéaire et voilà que Google s’en mêle. Dans son besoin de domination quelque peu paranoïaque voici que la firme mondiale crée un tout nouvel ordinateur véritablement révolutionnaire. Finies l’accumulation d’information, la mise en mémoire de toutes les expériences tentées, la récolte de données obtenues en testant tous les possibles.

           Le nouvel ordinateur n’a plus besoin que d’une chose : la connaissance absolue des règles du jeu et de tout ce qu’elles impliquent. Finies les banques de données et les stratégies mémorisées. A ce moment l’homme est totalement vaincu car il n’avait pu progresser que par ces moyens devenus désuets. C’est la fin de l’accumulation d’expérience par la connaissance de tout ce qui a été tenté. C’est la fin de l’amélioration progressive par l’intégration de données nouvelles et le progrès indéfini de la somme des acquis.

           Mais revenons-en à l’homme. Ce qui l’intéresse c’est de vaincre un adversaire, pas de progresser indéfiniment pour atteindre une toute-puissance hors de portée. C’est du moins ce qu’il s’obstine à affirmer. Alors on a inventé des règles à tous les jeux. On a fixé des limites et on a réglementé tout ce qui peut améliorer les performances par le biais d’améliorations techniques. Celles-ci ont été très nombreuses, depuis l’invention du vélo et de la perche à sauter. Depuis la création des palmes du nageur jusqu’au parapente. Mais en même temps on permettait à tout-un-chacun de bénéficier des mêmes avantages.

           Dans le fond peu importe la performance, ce qui compte c’est de prouver qu’on est le meilleur, le chef, le mâle dominant ou la super-femme ce qui revient au même. Bref qu’on est le meilleur dans sa catégorie en se mesurant à l’ego de son semblable dont l’ambition est identique. On sait ainsi à quoi l’on joue et à quoi ça sert. Et pour se rassurer il n’y a pas mieux.

 

                                                                  Le Chesnay le 15 janvier 2018

                                                                  Copyright Christian Lepère

 

"Babel au fil du temps" - détails

"Babel au fil du temps" - détails

373 - Échec et mat

A quoi ça sert d'être

le meilleur

si

les autres

sont nuls et insignifiants?

(Lao-Tseu ou Epictète?)

 

 

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9 janvier 2018 2 09 /01 /janvier /2018 07:42
"La fiancée du pirate" - huile sur toile - 73 x 60 cm - 2006

"La fiancée du pirate" - huile sur toile - 73 x 60 cm - 2006

Les jours sont courts

 

           Les jours sont courts, le temps maussade. Une insidieuse humidité pénétrante ramollit mes états d’âme, les rendant plus spongieux et fleurant le moisi de cave comme dans mes souvenirs d’enfance.

           Mais tout cela n’est pas bien grave. D’ailleurs c’est un temps de saison, conforme et réglementaire.

           Alors pourquoi aller chercher plus loin. Blotti sous la couette je tente de préserver un peu de douceur. J’attends le retour des beaux jours. Cà n’est pas bien exaltant et fournit peu de matière à réflexion. Il est vrai que par ailleurs d’autres occurrences me branchent sur des activités plus dynamiques. Ainsi un ami féru d’orientalisme m’a proposé d’illustrer une légende indienne. Celle du dieu Hari Hara vénéré au Cambodge. C’est une histoire fantastique telle qu’en a conçu l’exubérance orientale. Une histoire de non-dualité sur le bien et le mal relatif s’affrontant et s’entrechoquant avec violence et  passion, opposant les pires excès aux excès opposés, rééquilibrant l’invraisemblable au sein de la transcendance la plus absolue.

           Tout est bon pour Maya et ses manigances, l’illusion et le relatif dévergondé. Mais qu’importe puisque en fin de compte (enfin si l’on veut car il n’y a guère de tenue de compte dans cet imbroglio déjanté…) tout finit toujours par réintégrer la Source Divine dans sa splendeur éternelle. Enfin c’est le Grand Repos Métaphysique après tant de turpitudes insensées.

           On nous l’a dit et répété, Dieu joue à se perdre et se retrouver, c’est du moins ce qu’affirment les sages de toutes les traditions et pas seulement orientales.

Et c’est bien vu car Dieu est un joyeux luron, un enfiévré plaisantin, un qui n’a pas peur de se contredire et d’accumuler les coqs à l’âne. Mais j’ai dit Dieu, peut-être devrais-je dire plutôt les dieux car ils sont nombreux dans le panthéon indien à avoir symbolisé   tous les aspects de la nature humaine, semblables en cela aux dieux grecs qui n’en sont pas à quelques inconséquences près, entraînés qu’ils sont par leurs passions les plus adolescentes.

           Mais assez dit pour aujourd’hui, vous en saurez plus par la suite si un destin facétieux ne vient pas détourner mes projets.

 

                                                                  Le Chesnay le 8 janvier 2018

                                                                  Copyright Christian Lepère

"La fiancée du pirate" - détails

"La fiancée du pirate" - détails

372 - Les jours sont courts
372 - Les jours sont courts

A suivre...?

Peut-être ou peut-être pas...

Ça se discute!

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1 janvier 2018 1 01 /01 /janvier /2018 14:40
"Trafic sous influence" - huile sur toile - 73 x 60 cm - 2006

"Trafic sous influence" - huile sur toile - 73 x 60 cm - 2006

En arpentant les rues

 

           Trop c’est trop. En rajouter serait inconvenant. C’est du moins ce qu’elle se disait dans sa petite tête de linotte joliment peinturlurée. Comme le reste de sa personne était à l’avenant son moral était plutôt positif.  Son physique n’était que rondeurs accueillantes habilement placées aux endroits stratégiques et réparties sur une silhouette  faite de chute de reins évocatrice et de souplesse de  hanche, le  tout propulsé par la sveltesse de la cheville et la cambrure de la bottine.

           « Sois belle et remballe ta rengaine » c’est ainsi que Jojo son Jules adoré recevait ses doléances et ses revendications les plus légitimes. C’est qu’il était pointilleux sur le respect des traditions et la soumission aux bonnes mœurs qui permettent de savoir où l’on va. Mais le monde change et nous vivons une époque moderne  d’où l’esclavage et l’asservissement sont censés avoir disparu. Après les 40 heures hebdomadaires aménagées en 35 et un abaissement de l’âge de la retraite provisoirement définitif le progrès ne cesse de progresser aussi redondant que cela puisse paraître.

           Alors elle s’était décidée. Non pas à prendre le taureau par les cornes, ce qui est téméraire, mais à le circonvenir par de plus subtils moyens.

           D’emblée elle avait songé à se syndiquer, mais c’était coton. Car ça n’était pas encore assimilé dans l’inconscient des masses et que mettre sur pied pareille organisation demanderait au moins conseils et directives. Au moins de la part de ceux qui savent, qui ont de la bouteille et militent avec acharnement depuis fort longtemps. Et elle était bien jeunette pour en être déjà là. En tout cas pas au niveau des camarades de base qui ont progressé à l’ancienneté.

           Peut-être penserez-vous qu’elle aurait pu changer d’activité, trouver un autre job, quitter le plus vieux métier du monde pour un autre plus novateur. Bien sûr elle y avait songé mais entre la création d’entreprise sauvage sur internet, même dédiée à l’écologie sociale et pluridisciplinaire incluant la libido et ses fantasmes et la création d’activités tertiaires comportant un biologique non dénué de charme, elle avait hésité. Longuement. Avec sagesse.

           Le massage thaïlandais extrême, les pratiques de relaxation profonde d’inspiration tantrique, le taï chi le plus planant et le yoga tendance Kama Soutra l’avaient à tour de rôle interpellée. Sans oublier l’assistance téléphonique aux personnes en détresse libidineuse ou ayant besoin d’un gros câlin pour calmer leur peine de cœur.

           C’est dire le côté profondément humain de sa démarche. Mais pour concrétiser il faut des moyens et c’est là que ça se complique. Comment s’y prendre quand on a peu d’aisance dans le traitement informatique des données numériques ? A peine un soupçon de pratique sur Facebook et les réseaux sociaux idoines ? Des hésitations dans le maniement des clics et des liens qui permettent de surfer avec aisance ?

           Après bien des tentatives de mise aux normes, de longues séances de pratique du clavier, elle a cessé tout acharnement. Et c’est ainsi qu’elle s’est retrouvé arpentant le trottoir de la rue St Denis. Avec son petit sac à main bien serré contre son giron et ses airs de sainte qui n’y touche pas elle a réussi bon an mal an à joindre les deux bouts. Certes ce n’est pas le Pérou mais quand on a des goûts simples et qu’on n’est pas porté sur l’exotisme, la vie au grand air d’un quartier parisien plein de noblesse historique peut satisfaire les personnes modestes mais conscientes de leur dignité.

           Souhaitons- lui une longue et heureuse carrière sous la protection vigilante de son compagnon à qui elle évitera l’infarctus ou l’Alzheimer précoce fruit d’activités néfastes pour l’organisme. Cela l’amènera sans doute  jusqu’à une retraite heureuse et méritée où elle pourra enfin cultiver son jardin en toute quiétude, sans nul souci du lendemain qui comme disent nos amis Anglais est un autre jour.

                                                             Le Chesnay le 4 décembre 2017

                                                             Copyright Christian Lepère

 

"Trafic sous influence" - détails

"Trafic sous influence" - détails

371 - En arpentant les rues
371 - En arpentant les rues

Pas très moral tout ça?

Allons donc!

une

nouvelle 

année commence...

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26 décembre 2017 2 26 /12 /décembre /2017 08:13
"Envol des masques" - Huile sur toile - 80 x 80 cm - 2006

"Envol des masques" - Huile sur toile - 80 x 80 cm - 2006

Impressions d’hiver

 

        Incessante une petite pluie fine s’obstine sur la région. En réalité c’est plutôt une bruine issue d’un brouillard enveloppant qui noie la région dans son blanc linceul. Depuis des heures elle mouille en profondeur et petit à petit imprègne mon âme, pénètre mes pensées et ramollit ma substance. Pourtant il ne fait pas si froid et les fêtes sont  là. Déjà Noël est un souvenir. Des guirlandes d’une grande sobriété apportent une petite touche festive, si discrète. C’est que la crise sévit encore et qu’on se doit d’économiser sur les illuminations. La fée électricité est sommée de se montrer parcimonieuse.

           Dans la nuit d’hiver je m’avance vers mon logis qui m’attend confortable et bien chauffé. Les abords de la gare à peine quittés j’aperçois au loin la statue de Houdon barrant la longue perspective. Sur fond de crépuscule elle s’impose par sa blancheur fantomatique. Surgie comme une apparition dans le gris du quotidien. Le sculpteur est représenté dans une attitude énergique mais toute en souplesse, comme la plupart de ses œuvres. Il tient sa massette à la main, prêt à l’action, prêt à dégager du bloc de pierre inerte la forme vivante qui y reste emprisonnée pour l’instant. En compagnie de toutes les autres possibles qui resteront à tout jamais virtuelles, parties avec la matière dont le marbre aura été dégrossi. Créer c’est détruire. C’est choisir entre d’infinies possibilités la seule qui aura une suite et réjouira nos yeux et nos cœurs peut-être pour  longtemps. Jusqu’au prochain remaniement de l’impermanence incessante remplaçant le spectacle le plus habituel par autre chose, n’importe quoi, enfin de l’inattendu…

           Mais Houdon est au courant. Il n’est pas si naïf. C’est qu’il en a tant fait, tant sculptés, des bustes de ses contemporains, célèbres ou pas, ainsi que leurs statues en pied pleines de noblesse. Certaines œuvres sont connues et le méritent bien, telle la frileuse qui cache une nudité tendre et irréprochable en se couvrant la tête et le buste avec un drap savamment agencé qui lui donne des airs de moniale. L’expression du visage est d’ailleurs très intériorisée comme celle d’une personne plongée dans sa prière. Mais que le regard descende et s’attarde sur la douceur de la carnation et nous revoilà dans un quotidien plus tendre. Il est vrai que la censure pudibonde a mis son véto et que pendant bien longtemps la frileuse n’a pas eu de dos, pas eu de fesses, reléguée qu’elle était dans un coin sans possibilité de la contourner pour jouir de son côté pile. Le 18ème siècle était coquin mais bien- pensant et se préoccupait du salut de son âme.

"La frileuse" - sculpture de Houdon

"La frileuse" - sculpture de Houdon

           Mais Houdon a aussi rendu hommage à l’anatomie virile avec ses écorchés proclamant la perfection d’une stature humaine digne de la Renaissance. Le bras tendu ils marchent vers le monde avec assurance, noblesse et détermination.

           On connait aussi son Voltaire assis. Vieux, souriant, le maître semble partager les secrets de son humanité. Revenu de tout ou presque il observe le monde s’agitant sous ses yeux avec détachement. Une pointe de malice, beaucoup de lucidité et une secrète sympathie pour ses semblables, ombres en proie à leurs passions Pêcheurs non repentis ou si peu.. Ce n’est pas la sagesse mais avec un peu de lâcher-prise ça pourrait finir par y conduire…

           Enfin, ne rêvons pas, Houdon n’est pas si sage et puis il aime tant les apparences qu’il se garde bien d’aller voir plus loin au risque de perdre ses chères illusions. Mais déjà je passe à ses pieds. Sitôt l’endroit franchi voici la longue rue traversière qui conduit à la place de la Loi. Elle longe le vieux cimetière et est quasi déserte à cette heure tardive. Ensuite ce sera la rue de Versailles, tout aussi vide de son animation journalière aux heures plus actives de la journée. Mais il est doux de poursuivre dans le vide de la nuit quand on sait que chaleur et sécurité vous attendent pas si loin après quelques coins de rues vite franchis.

           Enfin, c’est la saison festive ! Les agapes vont continuer ! Après la première soirée du réveillon on va remettre ça. Bons vins et amuse-gueules. Huitres fraîches et iodées à souhait, langoustes et fruits de mer avant les plats plus roboratifs et de saison. Un grand besoin de chaleur, de faire le plein, de se caler la panse en arrosant de boissons délicieuses et pétillantes pour faire glisser et assurer un transit harmonieux. Et puis pourquoi s’en priver ? Fromages et desserts, café et pousse-café. On ira jusqu’au bout et même au-delà avec les chocolats et autres friandises. La bûche consommée, le champagne bu on va pouvoir se confier, évoquer les souvenirs d’enfance, ceux du bon vieux temps jadis. On va évoquer le passé et tous ceux qui y ont participé dont certains ne sont plus, mais où d’autres restés fidèles au poste poursuivent leurs exploits coutumiers dans un quotidien sans cesse renouvelé.

           Enfin on va fêter la nouvelle année. Celle qui nous attend avec ses joies et ses peines, ses événements inattendus qui deviendront inoubliables. Ses sautes d’humeur et ses balbutiements. Enfin tout ce qui fera la suite sans oublier  l’extravagant, l’inadmissible et le plus délicieusement surprenant.

           Le monde va suivre son cours. Comme toujours depuis le Big-Bang. Il ne nous reste plus qu’à nous souhaiter une bonne suite après un bon redémarrage et plein de bonnes choses juteuses et fruitées pour assurer un quotidien digne d’éloges, mais aussi riche  de ce qui a précédé au cours de l’année écoulée et qui va sous peu nous dire adieu pour laisser place à sa petite sœur toute fraîche et pimpante.

                                                                    Le Chesnay le 26 décembre 2017

                                                                    Copyright Christian Lepère

 

 

"L'envol des masques" - détail

"L'envol des masques" - détail

370 - Impressions d'hiver

L'année usée s'en va

la nouvelle

qui va

éclore

Se profile

dans les coulisses.

Réjouissons-nous braves gens!

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21 décembre 2017 4 21 /12 /décembre /2017 09:27
"La croisade" - peinture à l'huile - 46 x 61 cm - 1985

"La croisade" - peinture à l'huile - 46 x 61 cm - 1985

 

Charles Hubert

Suite et fin

 

           Mais au long des couloirs le spectacle se diversifie. L’oreille est aussi sollicitée que l’œil. De lourds flonflons se propagent depuis les profondeurs, bientôt remplacés par la complainte de l’aveugle qui posté dans son angle de mur attend depuis bien longtemps qu’on lui accorde attention. Mais le flot passe, pressé. Chacun se précipite vers son avenir, croisant celui des autres, ignorant les obstacles naturels qu’il contourne chaque matin.

            Charles-Hubert se hâte. Après des longueurs de couloirs d’une improbable correspondance le voilà sur le quai. En face un grand escogriffe déambule en cherchant la correspondance. Une grosse mémé postée avec  sa carriole attend placide qu’on la contourne. Une petite fille chétive se tortille en tenant la main de son papa. Envie de faire pipi ? Ou besoin de dire ce qu’elle n’ose pas. Ou autre chose d’inexprimable en langage humain ordinaire accessible aux autres ? On ne le saura jamais et d’ailleurs ça n’a aucune importance. Sauf pour elle. Mais la foule attend compacte que la rame arrive et déverse son contenu sur le quai. Avant de charger le suivant.

           Enfin Charles-Hubert accède à bord. Bientôt un SDF accablé vient faire la manche, sitôt remplacé par un moustachu à la voix suave susurrant une chanson désuète de Tino Rossi où sa bien-aimée l’attend en se morfondant toute frémissante d’espoir. Petit pincement au cœur…nostalgie, nostalgie…

           A chaque station la cargaison humaine se renouvelle. Les portes s’ouvrent libérant ceux qui sont en fin de parcours tandis que d’autres essaient de monter en leur barrant l’issue. Il n’y a plus qu’à tasser le tout et on repart vers de nouvelles destinations.

           Enfin c’est la gare St Lazare et son affichage électronique. La foule patiente, debout et déterminée, attend de savoir vers quel quai se précipiter pour bénéficier d’une place assise dans le sens de la marche et pouvoir enfin consulter son smartphone  pour ne plus rien ignorer de ce qui se passe dans le vaste monde.

Les stations se succèdent, le paysage se déroule, les banlieues déploient leur multitude d’immeubles cossus, de maisonnettes avec jardinets et d’immeubles de bureaux dressant leur insolence technologique. Le tout ponctué par quelques cimetières. Vastes champs du souvenir encore fleuris de chrysanthèmes que le train surplombe. Sûr de son fait il ne fait que passer. Comme d’habitude. Comme quand tout va bien, qu’il n’y a pas de grève du personnel roulant et qu’aucun désespéré n’a mis fin à ses jours bloquant de malheureux usagers qui ont bien d’autres préoccupations tout aussi légitimes.

           Tout le long du parcours défilent les murs tagués à mort, sommés de délivrer des messages vibrants d’amour ou de haine. Remplis d’invectives ou d’affirmations brutales. De sous-entendus réservés aux initiés, de messages codés informant les happy-fews…Le cri est primal, l’exécution capitale et de toute façon les intempéries finiront par tout effacer petit à petit en prenant leur temps. Il n’est que de patienter.

           Mais Charles-Hubert a atteint sa destination. Il est de retour chez lui. Un peu de marche à pied et il va pouvoir se délasser dans son confort quotidien. Ouf ça soulage ! Mais voici que son téléphone se met à sonner dans sa poche de blouson…pour lui annoncer quoi ? Il va le savoir sous peu. Bonne ou mauvaise nouvelle ? A moins que tout simplement on ne lui apprenne qu’il doit de toute urgence retourner à Paris où sa présence est souhaitée par Dieu sait qui. Et que dans ce cas c’est reparti pour un grand tour. Réjouissons-nous, de nouvelles aventures l’attendent ! Ce n’est pas aujourd’hui qu’il va risquer de s’ennuyer !

 

                                                         Le Chesnay le 2 décembre 2017

                                                         Copyright Christian Lepère

"La croisade" - détail

"La croisade" - détail

369 - Charles-Hubert - suite et fin
369 - Charles-Hubert - suite et fin

Ainsi Charles-Hubert va repartir

en croisade pour de nouvelles aventures.

Avouez que c'est exaltant

et que son destin 

peut attiser

bien des 

envies.

 

à suivre...

 

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12 décembre 2017 2 12 /12 /décembre /2017 09:14
Sans titre - dessin au crayon - 1969

Sans titre - dessin au crayon - 1969

Charles-Hubert

 

           Ce matin-là Charles-Hubert s’est levé. Comme tous les matins. Mais il était chez sa tendre amie. Après les ablutions et un petit déjeuner plus que frugal il l’a quittée, la laissant vaquer à l’aménagement de son studio coquet quoique un peu encombré. Rénovation oblige. Mais qu’est-ce que ça sera beau quand ça sera fait !

           Un clair soleil brillait déjà illuminant le canal St Martin dans sa splendeur de fin d’automne. Pour regagner le métro à République il lui restait peu à parcourir quand il a remarqué que le fond de l’air était frais parce qu’il avait oublié son écharpe. Qu’à cela ne tienne, il n’était pas pressé et pouvait pallier à cet inconvénient. Il a donc rebroussé chemin. Retour case départ. Voici l’entrée de la cour, la porte bleue blindée, le code d’accès puis la suite d’entrées donnant  sur une sorte de jardin intérieur paisible et provincial. Enfin sa tendre amie lui ouvre. Il récupère l’objet oublié. La vie est belle la journée peut s’épanouir.

           Mais le destin facétieux est à l’affut. C’est donc un peu plus loin que la fois précédente que son téléphone portable se manifeste pour lui apprendre qu’il a oublié ses lunettes. Petites lunettes de lecture à 15 €. Ce n’est pas bien grave. Il pourrait s’en passer. Certes il ne pourra pas lire les articles de fond dans le journal qu’il n’a pas acheté (dépenser de l’argent pour ce genre d’informations démagogiques ne servant qu’à manipuler une opinion populaire versatile l’indispose. Mais fermons la parenthèse avant qu’elle ne nous fasse oublier notre propos…)  En revanche il pourra déchiffrer les gros titres sur celui de son voisin de banquette dans le train de banlieue qui va le reconduire chez lui. Et c’est bien là l’essentiel. Gratuit et convivial. Evidemment après réflexion il doit admettre qu’il ne pourra pas déchiffrer certain mode d’emploi, surtout de substances pharmaceutiques, écrites en lettres très petites et très confidentielles. Mais il a ses vraies lunettes adaptées à sa vue chez lui, dans son chez-soi qu’il va atteindre bientôt si le destin l’y autorise.

           Enfin il a pu joindre le métro. Chaleur de l’accueil, escaliers et couloirs en enfilade. Enfin il faut s’acquitter pour pénétrer. Passage au tourniquet, introduction du ticket . « Ticket non valide ». Que se passe-t-il ? A-t-il déjà été utilisé ? Pourtant il est bien marqué RATP et SNCF et devrait donc permettre d’atteindre la gare St Lazare avant de continuer vers celle plus provinciale de Versailles Rive Droite…Second essai avec un autre ticket. Résultat idem. Enfin un honnête et simple ticket de métro permet l’accès.

           Maintenant c’est le réseau souterrain et sa chaleur conviviale. A cette heure encore matinale tout est en place pour qu’une journée comme les autres se déroule sans problème. La comédie humaine déroule déjà ses fastes et ses turpitudes. Le lever de rideau a eu lieu. Le spectacle peut commencer sans délai.

           Après des volées de marche la chaude haleine des profondeurs l’a englouti. Il suit les couloirs derrière les rondeurs exquises d’une biche au doux regard apeuré. Serrant son sac à main elle va son amble en balançant des hanches souples et élancées. Elle est précédée par une courtaude au mollet énergique mais dont les aimables rondeurs promettent du concret, du solide, de la vraie vie pas chère mais robuste. Du côté masculin ce n’est pas mal non plus. Entre l’ouvrier à casquette allant au turbin et le jeune exalté à la chevelure incandescente et à la barbiche en pointe se rendant à quelque manif pour défendre l’opprimé ou faire avancer l’égalité des quotas dans la fonction publique. Rien à voir avec le retraité trottinant qui le précède ou le gros lourdaud chef du contentieux  au Crédit Lyonnais. Et qui chausse du 48 qui lui procure un solide enracinement mais pas forcément une grande confiance en sa bonne étoile. Tout ce petit monde contourne habilement la mendiante Syrienne affalée dans son châle et tendant une main hagarde avec un regard implorant l’aumône de quelques pièces. « Pour manger » c’est écrit sur la pancarte.

                                                                                                               à suivre

 

Sans titre - dessin au crayon - 1969

Sans titre - dessin au crayon - 1969

Ah!

La douce chaleur du métro

pendant ces temps de frimas et de petit vent frisquet.

Douce tiédeur des entrailles

de la terre!

A

suivre

si vous voulez...

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5 décembre 2017 2 05 /12 /décembre /2017 08:35
"Elle en perdit la tête" - huile sur toile - 100 x 81 cm - 1986

"Elle en perdit la tête" - huile sur toile - 100 x 81 cm - 1986

 

Noir et blanc

Suite et fin

 

 

Mais j'en reviens à l'enfant. Se prenant pour Jean-Paul ou pour Noémie, le voilà qui prend son ours en peluche pour un ours en peluche. À partir de là, il n'a plus le choix. Ce qui l'aide à exister est bon, ce qui vient semer le doute est mauvais. La dualité est posée, ferme et définitive. Il ne reste plus ensuite qu'à jouer le jeu jusqu'au bout selon sa logique démente. Et voilà le départ de toute une vie hantée par le besoin de séparer le bien du mal et de classer les autres, tous les autres, hommes, bêtes et objets en deux catégories. Les bons qui m'aiment et me veulent du bien et les méchants qui vont m'anéantir.

 Chez l'adolescent la chose est bien connue, il faut que la classification soit immédiate et momentanément définitive. Tel chanteur de rock est génial et tel autre nul. Entre le zéro et l'infini pas de possibilité d'un juste milieu. C'est tout ou rien. Bien sûr c'est très caricatural, mais il n'est que d'observer qui que ce soit pour voir que tous nos fonctionnements continueront ensuite de reposer sur cette opposition fondamentale. Logique binaire d'ordinateur. Ça passe ou ça casse... Le problème est ensuite de fonctionner comme un adulte. Et là, apparemment les choses devraient s'arranger. L'observation des hommes politiques peut par exemple nous montrer des gens qui jonglent de façon extrêmement subtile avec les notions et arrivent à une grande ambivalence dans les appréciations. Auraient-ils donc réussi à dépasser le manichéisme de base? Auraient-ils enfin compris que les choses ne sont pas si simples? Qu'entre le noir et le blanc s'étend l'infinie diversité des gris et que d'ailleurs on peut passer de l'un à l'autre de façon tellement graduée qu'on oublie de s'en apercevoir? Ainsi la nuit est tombée si lentement par ce beau soir que d'un seul coup nous voilà surpris: il fait noir! On ne voit plus rien! Moment de trouble et de ravissement. Pendant que mes pensées avaient le dos tourné, voilà que la lumière estivale s'est subrepticement changée en son contraire. Et je n'en ai rien su!

Mais revenons à la politique et à ceux qui y croient. Auraient-ils donc enfin dépassé la naïve classification enfantine? Nullement! Ils ont simplement compris que les choses changeaient. A la place d'objets fixés et totalement définitifs, ils voient des objets terriblement fugaces, mais tout aussi fixés. Leur vision est celle de la caméra de cinéma qui a enregistre une suite extrêmement rapide d'images. Et certes la projection de ces images selon le rythme convenable va à nouveau nous faire croire à la fluidité de l’existence. Et pourtant ce ne sont toujours que des images distinctes, figées, séparées les unes des autres se succédant sans relâche. Seize images par seconde ne suffisant plus, on a affiné le processus et voilà maintenant que l'image est numérisée. A ce point et pour notre grossière sensibilité, l'illusion est totale, l'artifice entièrement masqué. Et pourtant quels que puissent être les progrès ultérieurs, il s'agit toujours de la même chose. Chaque point numérisé est toujours une entité, une chose, observable et définissable. Un objet placé devant le sujet. Et bien sûr cet objet ne peut être que bon ou mauvais. Comme son voisin. Ainsi la perversion essentielle de la perception directe des choses nous a conduits à une vision folle. Folle mais efficace puisqu'elle a permis toutes les découvertes scientifiques et dans la foulée la maîtrise technique et technologique sur quoi repose notre civilisation de progrès.

Alors, faudrait-il retourner en arrière, renoncer à tout l'acquis pour à nouveau battre le silex dans quelque grotte du Périgord? Et vivre de chasse et de cueillette? Allons, soyons sérieux, ce n'est pas en régressant que l'on verra le bout du tunnel. Ce n'est pas en refusant la technique la plus sophistiquée que l'on va acquérir le moindre soupçon de bon sens. Les bergers d'Arcadie étaient-ils plus sages que nous? Après tout peut-être, mais seulement dans l'exacte mesure ou ils ne se prenaient pas pour des bergers d'Arcadie. Alors que faire si l'on pense enfin avec juste raison que Socrate se prenant pour Socrate ne serait plus que Socrate? Et que de toute manière cela importe peu dans la mesure où il est mort et enterré depuis bien longtemps.

Que penser en son âme et conscience quand on a l'intime certitude que tout gît là dans ce constat : le bien et le mal sont relatifs et tous nos jugements ne valent que dans l'instant, confrontés à l'originalité inaliénable de chaque situation réelle. Que faire ou que penser?

Alors enfin coincés au pied du mur ne reste plus qu'une seule issue. Toutes nos opinions, tous nos préjugés reposent sur des données partielles et ne peuvent donc être que faux. Toute notre subjectivité ne fonctionne qu'en mode binaire. Rien ne nous prédispose à envisager les choses telles qu'elles sont et d'ailleurs une telle attitude serait l'exact opposé de celle qui dicte les comportements contemporains, où tout doit être soumis à l'intérêt personnel et au bon vouloir de nos désirs. Donc à la subjectivité la plus complète.

Alors l'issue est là béante, tellement simple et tellement inacceptable pour nos esprits confus s'attachant à la vaine recherche d'une sécurité. L'issue est là et elle ne peut-être que dans l'acceptation enfin vécue des situations réelles de notre vie, telles qu'elles se présentent, toutes crues et enfin dévêtues de leurs oripeaux de rationalisations mensongères. La vie telle quelle. Ni plus, ni moins.

 

                                                                    Le Chesnay le 24 décembre 1994

                                                                        Copyright Christian Lepère

 

 

367 - Noir et blanc (suite et fin)
367 - Noir et blanc (suite et fin)
367 - Noir et blanc (suite et fin)

Après ces hautes considérations

revenons-en

à nos

moutons

et aux aléas 

de notre quotidien

qui nous attend au tournant de la semaine à venir

 

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