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25 novembre 2014 2 25 /11 /novembre /2014 10:00
'Le moribond" - Gravure à l'eau-forte imprimée sur Arches Demi-Jésus - 1973

'Le moribond" - Gravure à l'eau-forte imprimée sur Arches Demi-Jésus - 1973

 

Trafic

 

       Jusque-là tout allait bien. Le moteur ronronnait gentiment, les reprises étaient nerveuses juste ce qu'il faut. Un sentiment de sécurité coutumière pouvait s'installer. Mais voilà qu'après le deuxième rond-point l'entrée de la rocade souterraine sous Versailles évitée, un soupçon de bouchon se profile au loin. Normal !  Il y a au bout de la ligne droite un feu tricolore particulièrement complexe et qui n’accorde le passage que parcimonieusement à ceux qui débouchent ici et dont je fais malencontreusement partie. La stratégie est simple. Il faut anticiper. Si on ne colle pas au véhicule qui précède, prêt à bondir, ça va repasser à l'orange puis au rouge avant de reverdir à nouveau. On risque une attente à répétition.

             Pourtant les panneaux d'affichage étaient rassurants. Les messages électroniques instantanés promettaient même d'atteindre le périphérique dans un délai optimal inattendu. Un peu désabusé je n'avais pas pu m'empêcher de douter un peu de la fiabilité d'affirmations dépendant de calculs complexes portant sur des mesures  nombreuses mais ponctuelles et ne pouvant pas tenir compte des aléas imprévisibles parce que non quantifiables dans les coefficients de pondération des données brutes…J’espère que vous m’avez suivi… Même si ces données brutes sont obtenues par des mesures précises et irréfutables. Nous vivons dans un univers de probabilités statistiques ne reflétant que très schématiquement une réalité quotidienne autrement plus subtile où la douceur printanière d'un alizée et la survenue inopinée d'un chat vivant sa vie d'errance insouciante peuvent contraindre le plus précautionneux des automobilistes à un freinage aussi brutal qu'inopiné le faisant dévier de la courbe irréprochable qu'il avait prévue après avoir dépassé la benne de ramassage des encombrants. Mais le mot « hasard » n'est qu'un voile pudique cachant notre ignorance de l'infinie richesse de notre monde quotidien qui pourtant est régi par des lois physiques, chimiques, organiques et mentales aussi précises qu'implacables. Mathématiquement incontournables. Ceci étant posé, de façon ferme et définitivement provisoire, j'avoue donc n'accorder qu'une confiance relative aux affirmations des panneaux électroniques qui nous dévoilent un avenir prévisible. Surtout si on se noie dans la masse qui aimerait assouplir un code de la route tatillon mais éprouve une crainte salutaire des contrôles radar inopinés.

             Mais je m'égare...Au loin donc je vois se profiler un obstacle à mon désir d'atteindre la capitale au plus vite. C'est fâcheux ! Je me rapproche donc prudemment de l'endroit et voici que contre toute attente je peux passer avec ceux qui me précèdent mais qui ont démarré avec une synchronisation surprenante. Dans la foulée je m'engage sur l'autoroute. Horreur ! C'est totalement figé. A perte de vue. Mais faire marche arrière dans une bretelle de raccordement à une seule voie, talonné par une file de véhicules qui ont le même but est plus qu'impératif. Donc patientons…

             Mais sur les trois voies de l'autoroute la masse innombrable des véhicules commence à s'ébranler. Avec prudence et lentement et puis on accélère petit à petit. De plus en plus. De plus en plus ! On va même finir par atteindre les 110 km heure autorisés. Passé le tunnel de Saint Cloud une courbe majestueuse et descendante nous fait franchir la Seine. Au loin les tours de la Défense se dressent vers le ciel formant comme une sorte de rempart qui clôt l'horizon. La comparaison est osée mais cela me rappelle un peu Carcassonne. En plus High Tech et sans le charme des légendes médiévales. La courbe se poursuit et voici qu'au loin l'élégante silhouette de la Tour Eiffel domine la vie innombrable de la grande cité. Sous un ciel gris et serein c'est un spectacle apaisant. Le monde est là et s'étend au loin derrière la courbure de la terre. Si loin même qu'en poursuivant on finirait par atteindre le bout du monde. Peut-être l'Asie et même, qui sait le Japon. Ce Japon dont les autochtones n'hésitent pas à monter dans un Boeing pour venir photographier la statue équestre du Roi Soleil ou immortaliser le souvenir de leur fidèle épouse  au pied de la Dame de Fer.

                 Et tout ceci est bel et bon. Mais il me reste à m’engager dans la voie sur berge pour traverser Paris. En route donc vers de nouvelles aventures. Je ne vous promets rien, mais avec un peu de chance vous connaitrez la suite la prochaine fois si la marche du monde m’y autorise et si le réchauffement climatique reste dans des limites raisonnables.

                                                       Le Chesnay le 24 novembre 2014                                                                                    Copyright Christian Lepère

"La cabane à Mimile' - eau-forte imprimée sur papier Arches Demi-Jésus - 1973

"La cabane à Mimile' - eau-forte imprimée sur papier Arches Demi-Jésus - 1973

Comme dit précédemment 

la suite dépend de paramètres indépendants

de ma volonté

et ne saurait donc m'être reprochée.

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