"La belle saison" - gravure à l'eau-forte - 28 x 39 cm
Le temps qui prend son temps
Myosotis et campanules
Pâquerettes endimanchées
Du bleu, du blanc, du mordoré
Tapissent le flanc du fossé.
Bien jeune et un peu neuf
À ce qu’il me semblait
Je hantais la campagne
Sous des cieux bourguignons.
J’errais ainsi sans but
J’étais dans mon jeune âge
Naïf et sans malice
Mais pas sans illusions.
Parmi les liserons, les mauves et les roses
Parmi les pissenlits jaunissant la prairie
Parmi les herbes vertes en la nature éclose
Léger et incertain je cheminais sans bruit.
Un battement de cils
Quelques extrasystoles
Un clin d’œil à la vie
Un soupir qui s’envole.
Mais un avion passait, ronronnant tout en haut
Dans l’azur éperdu comme un coléoptère
Et voilà que déjà et voilà qu’à propos
Ici en cet instant, sans nulle ambiguïté
Le temps vibrait tout nu, immobile et sans voix.
Avouant qu’il n’était pas et ne s’écoulait guère
Et que depuis toujours, de toute éternité
Il avait fait comme si, il avait laissé faire
Il nous avait sans fin laissé tout inventer.
Ainsi tenant son rôle et mentant sans vergogne
Il ne cesse jamais de tisser son filet.
N’hésitant devant rien et jurant sur parole,
Sur nous et nos amis, nos proches, nos cousins
Il brode sans répit des histoires de brigand
Et nous berne de contes à dormir éveillés.
Mais le temps prend son temps
A nous de nous méfier
Myosotis et campanules
Pâquerettes endimanchées
Du bleu, du blanc, du mordoré
Tapissent le flanc du fossé.
Le Chesnay le 16 septembre 2011
Copyright Christian Lepère
"Le long du sentier" - gravure à l'eau-forte - 28 x 39 cm