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23 septembre 2012 7 23 /09 /septembre /2012 07:09

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                                                 "L'escorte" - huile sur toile - 46 x 38 cm - 1992

 

Moi et la toute puissance

-en toute simplicité-

  

         Excusez moi, ce n’est pas un scoop. Tout le monde le sait, l’enfant qui naît est innocent. Bien sûr il a déjà des souvenirs de sa vie intra utérine et peut-être même plus anciens. Il est aussi équipé pour sentir et ressentir mais il ne sait pas bien quoi…D’ailleurs quelle que soit sa frustration il se met à hurler : faim, soif, chaud, froid, épingle à nourrice sournoise,  la réponse est toujours la même, instinctive et totalement involontaire. Comme l’animal il ne veut pas mourir, mais sans comprendre de quoi il retourne. Totalement dénué de concepts, donc de symboles, ignorant les possibilités d’un langage articulé, il est à la merci de tout. Mais il ne le sait pas.

         Pourtant il est conscient. De quoi ? De tout. Comme l’animal au premier degré, brut de coffrage.  Surtout il ne sait pas qu’il est limité. Pour lui les notions d’ « autre » et de « moi » sont encore  des hypothèses qu’il serait bien incapable de formuler. Donc il « est ».

         C’est d’abord à ses dépens qu’il va découvrir la dure réalité. Après l’agression du monde extérieur (mais il n’y a pas encore d’extérieur) il va  commencer à envisager l’impensable « Mais alors je ne suis pas seul …» D’abord avec maman qui n’est plus le prolongement biologique de son propre corps et qui ne manifeste pas toujours son accord avec l’autre qu’il est devenu.

         Au début tant que le corps et les besoins affectifs sont satisfaits tout baigne dans un bonheur parfait, une extase permanente, un bonheur indicible (Evidemment indicible puisque sans mots pour le dire…). D’ailleurs cela se voit. Il n’y a qu’à regarder un bébé qui repose béat et satisfait. Ca n’est pas sans rappeler le sourire du Bouddha.

         Et puis progressivement, parfois très vite, la situation se dégrade. L’ « Autre » apparaît et en face le « Moi ». « Moi-Je ». L’ego en termes plus pédants. Alors la traversée commence. Le paradis est perdu. Le Bon Vieux temps s’en est allé. Avec l’autre voici la dualité et l’opposition. Parce que l’autre peut être sympa mais pas toujours. C’est selon son humeur. Et il peut même devenir carrément pénible, odieux, insupportable, bon à jeter par la fenêtre. Maintenant il y a un territoire à défendre, des frontières à préserver à tout prix. Alors, l’attaque étant la meilleure des défenses, il ne reste plus qu’à se procurer des armes et peaufiner des stratègies. Ce thème ayant été abordé de façon exhaustive, fine, documentée et complexe par de multiples stratèges je m’abstiendrai d’entrer dans des détails qui d’ailleurs me dépassent complètement. Si vous avez le temps rendez visite à Machiavel et à Clausewitz qui vous attendent sur Wikipédia. Ils savent de quoi ils causent. Ils ont bien étudié la question.

         Dès ce jour tout est joué, le destin de l’humanité est tracé irrémédiablement. Dès qu’il y a un autre il est un ennemi potentiel et le meilleur ou la meilleure amie (Encore plus, paraît-il si l’on fait confiance à des documents accablants tels que l’émission télévisuelle « Les feux de l’amour » qui depuis bien des lustres et sur la deuxième chaîne dénonce les turpitudes sentimentales. Avec d’ailleurs très peu de succès. Mais c’est normal, on n’est jamais prophète en son pays…

         Chacun et chacune connaît la loi du balancier. Si il va loin à droite, il ira aussi loin à gauche. Vous avez pu le remarquer même si vous n’êtes ni Napoléon ni Nicolas Sarkozy, ni le plombier qui sait bien que plus on répare plus on se rapproche de la catastrophe finale. Ainsi, plus la marée monte haut et plus elle redescendra dans les heures qui suivent. Plus dure sera la chute.

         Et la toute puissance dans tout ça ? Pas d’affolement, j’y arrive. Que revendique le nouveau-né ? D’être totalement satisfait, de ne souffrir d’aucune opposition, de baigner dans le positif absolu. Fort bien mais il va être déçu.

         Devenu plus grand il va constater qu’il est bourré de désirs : de glace à la pistache, de sacs de billes et autres babioles parce qu’il lui manque quelque chose. Comme il n’est pas idiot il va tout naturellement en déduire que pour être heureux il faut pouvoir satisfaire tous ses désirs et n’avoir plus peur de rien. Il va donc s’y mettre mais constater très vite  que c’est sans fin et qu’il n’y arrivera jamais. Il va alors avec finesse devenir « raisonnable » (A sept ans paraît-il) et commencer à se mentir à lui-même, donc aussi aux autres, ça va de soi. En un mot il vient de s’engager dans l’engrenage diabolique, dans la quête épuisante et sans espoir. Il va chercher jusqu’à l’épuisement l’Absolu dans le relatif. Comprenant malgré tout que c’est impossible, car il n’est pas si idiot que ça, il va trouver un merveilleux substitut : le symbole, le support de projection.

         Depuis la collection de timbres, jusqu’aux médailles d’or des J.O. en passant par la drague sur internet et en arrivant à la conquête de la présidence de la république, tous les moyens seront bons pour tenter de satisfaire son besoin d’absolu sur un support plus limité mais, qui sait, peut-être accessible. Faut voir…le dictateur n’en a jamais assez, pas plus que le Don Juan ni même le collectionneur de porte-clés.

         Alors c’est sans issue ? Ca dépend mais en réfléchissant bien il  semble n’y avoir qu’une porte de sortie. Et si c’était d’abandonner  la toute puissance et de ne plus vouloir être le Maître du Monde ? Reniant Furax et Fantômas, jetant madame Thatcher aux orties et renvoyant Sarkozy se faire du fric dans le privé. Bien, on en parlera à Bachar el Assad et à Poutine. Peut-être aussi au voisin qui nous enfume avec son barbecue et ses relents de merguez grillées. Peut-être même à nos rejetons et à nos collègues de bureau et au technicien de surface qui entretient les allées du Super U. Ah, j’oubliais aussi les caissières mais on ne peut pas penser à tout.

 

                                                                      Le Chesnay le 25 août 2012

                                                                      Copyright Christian Lepère

 

204 Axis mundi 73 x 60 cm

                                "Axis mundi" - huile sur toile - 73 x 60 cm - 1992

 

LA SUITE 

         La semaine prochaine sous le titre  « Le Zèbre et le Poisson Rouge » je vous parlerai de Moi-Même. Toujours en toute simplicité. Sait-on jamais peut-être que ça parlera aussi de vous ? Il y a parfois des coïncidences curieuses.

                                                                  Alors à plus…

 

             

 

 

 

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