Arc-en-ciel
Le pinceau court sur le papier répandant son jus coloré. Après une flaque de terre de sienne coulant dans des ornières d’ocre rouge voici qu’un soubassement de terre d’ombre structure un paysage formé de multiples nuances de gris. Des plus sombres aux plus légères, des plus neutres avec de faux- airs de camouflage aux impalpables résurgences de nuances carcérales. Mais plus haut palpite un bleu de ciel, plus pur qu’un ange passant sans prévenir. Il est nimbé de gloire comme une accalmie après la tempête. Ourlé de petites vague rose plus nacrées que les chairs adolescentes d’une vierge sainte qui se pâmerait d’aise.
Dans toutes ces couleurs se mêlant sur ma palette, il ne manquerait plus qu’un arc-en- ciel déployant ses fantasques harmoniques, dévoilant toute la gamme du visible. A tout va le chromatique révéler ses ultimes ressources grâce à la diffraction du prisme.
Sombrons maintenant dans le violet, profond comme une nef de cathédrale gothique quand tombe le soir après un long jour exalté. Puis glissons dans les nuances nostalgiques de l’indigo intermédiaire obligé avant le bleu. Mais de quel bleu s’agit-il ? De celui, martial du drapeau ou de la richesse plus fine d’un outremer dégradé préfigurant une nuance plus pure. En tout cas pas du bleu primaire sans âme dont ont raffolé des peintres qui se voulant abstraits et révolutionnaires y ont perdu toute la richesse mouvante du réel. Toute la somptuosité de la nature dans sa créativité inépuisable. Surgit maintenant le vert. Celui des prés, tout printanier ? Ou cet autre plus profond recelant l’islam et sa rigueur mystique ? Ou encore celui de « l’absinthe aux verts piliers » chantée par Arthur Rimbaud ?
Enfin voici le jaune, exalté, rayonnant, triomphal dans toute sa gloire de soleil cuisant le désert comme une pâtisserie croustillante et parfois prêt à tout anéantir. Mais nous n’en sommes pas là ; Ce jaune est aussi celui du soleil qui réchauffe la nature au sortir de la morte saison. Enfin voilà qu’il s’approfondit, se nuance et pour tout dire se réchauffe pour s’épanouir en des nuances d’orange rappelant la multiplicité des fruits qu’il gorge de sucre et fait murir généreusement. Enfin tout cet éventail va se terminer avec le rouge, impérial et définitif, sûr de sa puissance.
C’est ici que pour nous le spectacle va se terminer, pauvres créatures que nous sommes, limitées par leur physiologie, incapables de percevoir au-delà. Pourtant la technique nous vient en aide et des militaires furtifs peuvent détecter leurs semblables dans la nuit la plus obscure à l’aide de lunettes captant les infrarouges, rendant ainsi la chaleur humaine visible.
Mais si cela nous rends plus opérationnels pour dominer les autres, il n’en reste pas moins que les couleurs de l’arc-en-ciel ont toujours suffi aux poètes que sont les peintres pour chanter les beautés du quotidien. Ce dernier allant du pittoresque au sublime mais restant toujours capable de rendre notre vie plus ouverte sur l’ailleurs qu’est pour nous le monde. Au moins tant que nous croyons être enfermés dans ce corps plus limité que notre âme.
La Brosse Conge le7 mars 2022
Copyright Christian Lepère
Un clair soleil brillait sur la baie de Menton !
Retour par autoroute et péages…
Ennuis divers et variés…
Rien n’est simple
Et pourtant
Tout est
Là
Juste où la vie continue comme d’habitude…