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11 août 2015 2 11 /08 /août /2015 08:11
"Les admirateurs" - huile sur toile - 46 x 38 cm - 1989

"Les admirateurs" - huile sur toile - 46 x 38 cm - 1989

« A la recherche du temps perdu »

par Nina Companeez

 

           J'avoue m'être encore laissé piéger. Après avoir allumé la télé j'ai zappé sur Arte. Dans l'étrange lucarne voici que sont apparues des images qui me séduisent. Harmonieuses, équilibrées, parfaitement adaptées, elles ont le charme désuet d'un passé cher à Marcel Proust. Les couleurs sont subtilement nuancées. Ce ne sont qu'harmonies de beiges, de gris bleutés, de brun Van Dyck, de jaune de Naples et de blancs savamment déclinés. Du beau travail en vérité et parfaitement adapté au propos. Il s'agit d'une série réalisée par Nina Companeez et qui s'intitule tout simplement « A la recherche du temps perdu ».

             J'ai lu jadis cette œuvre fleuve ou tout au moins les parties qui me semblaient essentielles. Car j'avoue ne pas toujours m'être vautré avec délices dans les complexités psychologiques de la noblesse et de la haute bourgeoisie qui fleurissaient  encore en 1900. Mais c’est tout le paradoxe. Comment dans cette époque encore lourdement conventionnelle où l'on avait du mal à appeler un chat un chat, ces gens cultivés, bardés de références, sûrs de leur fait et de leurs prérogatives arrivaient-ils à vivre leurs passions ? Car ils y arrivaient, avec toutes les conséquences dramatiques ou loufoques que cela implique.

             Par chance un témoin était là, posté aux aguets et se trouvant impliqué dans les méandres des conventions. Voici donc au premier plan le narrateur. Grand jeune homme un peu pensif encore plein d'illusions mais doté d'une intelligence et d'un sens de la subtilité assez exceptionnels. Un peu oisif comme il se doit, ne s'étant pas encore consacré à l'élaboration de son œuvre, le voilà qui se retrouve au Grand Hôtel de Cabourg. Face à la mer infiniment changeante et à ses états  d'âme soumis aux variations atmosphériques et aux rencontres inévitables. Car nous sommes dans un monde de convention où tout est réglé par l'étiquette et les obligations convenables. Par ce qui se fait et par ce qui est grossièrement inopportun.

             Le narrateur va donc vivre sa jeunesse. Voir disparaître sa grand-mère qu'il aimait tant. Se laisser fasciner par la petite bande de jeunes filles en fleurs qui font la nique aux conventions pesantes et se permettent des fou-rires irrévérencieux en sautant les barrières ou en rendant visite à un peintre impressionniste majeur mais qui est resté si simple…

             Il va aussi rencontrer des personnages plus étranges ou simplement plus ambigus. Le jeune Robert de Saint Loup va devenir son ami. Puis il aura des démêlés avec le très contourné baron de Charlus, monstre d'ambivalence habité par un orgueil délirant et se complaisant dans la déchéance mais avec noblesse.

             Il va aussi admirer jusqu'à la déraison la duchesse de Guermantes et tout faire pour connaître son monde aristocratique qui lui paraît si mystérieux. Jusqu'au jour où il va être invité dans le Saint des Saints par son idole et réaliser que tout cela est beaucoup plus plat, anecdotique et convenu que ce qu'il avait rêvé avec exaltation.

             Le voilà donc qui petit à petit retombe de haut, réalisant à quel point il s'est menti à lui-même en se concoctant de grandes passions amoureuses, puis en les voyant s'éteindre sans bruit comme les fleurs qui se fanent.

             Tout cela est bien connu, surtout depuis que Proust nous l'a montré. C'est ce qui fait qu'à la fin du premier film j'ai éteint la télé. La seconde partie allait commencer séance tenante mais j'avais eu ma ration d'esthétique et de turpitudes. Et puis la suite je la connaissais. D'ailleurs ce qui m'intéresse véritablement c'est l'aboutissement ou comment un certain Proust, Marcel de son prénom a réalisé une percée métaphysique non négligeable avec l'aide bénévole de sa petite madeleine ou en trébuchant sur les dalles disjointes de l'église Saint Marc à Venise. Ou comment un snob un peu fat a découvert ses propres profondeurs qui sont aussi sans doute les nôtres.

 

                                                 La Brosse Conge le 31 juillet 2015

                                                 Copyright Christian Lepère

"Les admirateurs" - détail

"Les admirateurs" - détail

"Les admirateurs" - détail

"Les admirateurs" - détail

"Les admirateurs" - détail

"Les admirateurs" - détail

Temps estival !

Mais ne ferait-il pas un peu chaud?

Et les normales de saison sont-elles bien respectées

au moins selon la moyenne statistique?

La question se pose !

Mais comme disait tonton Raymond

un oncle à moi :

"Tout ça n'est pas suivi..."

Et c'est parfois bien ennuyeux !

Enfin

pas d'affolement

on verra bien après le 15 août...

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1 août 2015 6 01 /08 /août /2015 20:31
"La tribu" - huile sur toile - 46 x 38 cm - 1987

"La tribu" - huile sur toile - 46 x 38 cm - 1987

Bicentennial man  

 

 

             J'avoue m'être laissé piéger. C'est qu'il faisait chaud et lourd et qu'aucune amélioration n'était prévue aux informations. Alors j'ai zappé. Après les turpitudes habituelles me voici sur Arte et c'est le début d'un film de science-fiction « Bicentennial man ». Je vais me laisser faire et le voir pour la seconde fois. C'est que la première m'avait laissé perplexe et en tout cas m'avait interpellé dans mes profondeurs les plus obscures.

             L'histoire est simple. Un brave homme achète un robot  pour aider son épouse dans les tâches ménagères. On lui livre la chose  et toute la famille se trouve réunie autour du nouveau venu. Les réactions sont diverses, attirance, admiration mais aussi méfiance, peur et sentiments inavouables. L'ambivalence est à son comble. Le côté humain tellement bien imité et des comportements d'une précision électronique font du robot un serviteur fidèle. Serviable jusqu'à l'excès sa devise est : « L'on est heureux de pouvoir servir ». Il est admirablement programmé.

             Autour il y a des humains qui ne peuvent s'empêcher d’anthropomorphiser, surtout quand ils sont d'un âge tendre. « Petite fille » et « Grande fille » ne vont pas s'en priver. La plus âgée va même tenter de se débarrasser de l'intrus en lui demandant d'ouvrir la fenêtre, puis de se pencher...Ce qu'il fait obligeamment n'y voyant pas malice. Un peu plus tard il va frapper à la porte d'entrée en bien piteux état. Cabossé, sali, plein de tics informatiques et de dégradations de logiciels qui le font ressembler à un vieillard atteint de Parkinson.

             Mais rien n'est simple et très vite l'androïde va sembler s'attacher à ses maîtres. Attentif il saisit leurs états d'âme et souhaite combler tous leurs souhaits. Il n'est pas programmé pour mentir...sauf si un pieux mensonge est ressenti comme un moindre mal. Son éthique est plus fiable que celle de bien des humains.

             Mais c'est une sorte de mutant. Ses désirs outrepassent ses limites mécaniques. Sa programmation a des failles et laisse la place à des improvisations. Tel un enfant il prend conscience du monde et de lui-même. Il est en train de s'humaniser en développant ses capacités diverses. Il se lance dans le bricolage, la réparation d'objets, la fabrication d'artefacts dont les qualités esthétiques surprennent évidemment. Le voici qui commence à gagner de l'argent ce qui nécessite un compte en banque...Le chef d'entreprise, responsable de sa fabrication pense que ces facéties sont dues à de petits  défauts de programmation, des insuffisances de logiciels et qu'on pourrait y remédier facilement par un peu de chirurgie électronique. Mais l'intéressé ne l'entend pas de cette oreille. Son avocat  non plus !

             Soutenu par plusieurs membres de la famille qui l'ont intégré et le ressentent comme un proche, si ce n'est un semblable il va finir par avoir envie d'être libre. Oui mais libre de quoi ? C'est la question…

             Pendant ce temps la vie s'écoule. Les humains vieillissent suivant les lois biologiques. Certains meurent et notre robot croyant retrouver « Petite fille » qui est devenue grand-mère entre temps se retrouve avec la représentante de la 3ème génération. Mais les jeux de la ressemblance génétique  font qu'il va s'attacher à cette nouvelle version désormais plus vraie que l'ancienne. L'art et l'esthétique vont faire maintenant partie de sa vie, puis les passions humaines et l'amour, même physique.

             Il faut dire qu'entre temps il a rencontré un chercheur génial qui a poussé l'étude de la robotique jointe à des recherches en biologie expérimentale au point de pouvoir conjoindre les deux. Petit à petit Andrew va se retrouver pourvu d'organes, donc de sensations, d'affects, voire de sentiments avant de se voir vivre dans un corps biologique complet. C'est de la science-fiction me direz-vous ! Certes ! Mais quand même...A l'heure qu'il est au moins deux hommes ont vécu pendant un certain temps avec un cœur artificiel. Il est vrai qu'en sens inverse nos ordinateurs n'ont pas encore d'yeux ou d'oreilles qu'on pourrait leur tirer quand ils ne sont pas sages. Et encore moins d'organes vitaux qui viendraient assouplir leur rigueur mathématique. Mais au train où vont les choses  on peut se demander ce que nous réservent les chercheurs de pointe qui de toute façon tenteront tout ce qui peut être tenté. Par exemple insérer des puces électroniques dans le cerveau ? C'est fait ! Ou permettre aux neurones de commander une main artificielle ? Pas de problème ! C'est déjà du passé. Alors ?

             Mais si ce film m'a marqué profondément c'est parce qu'il pose des questions ultimes. « Qui suis-je ? » demandait Ramana Maharshi. Ou plutôt «  Que suis-je ? ».

C'est ce qui préoccupe ce brave Andrew. Après avoir voulu passionnément devenir humain pour pouvoir partager sa vie avec la compagne chère à son cœur, voilà qu'il est confronté au problème basique. Elle est mortelle et lui ne l'est pas. La fin du film approche. Pour assumer son destin il ne lui reste plus qu'à devenir biodégradable. Son ami bricoleur de haute technologie bio électronique a aussi la solution qui lui permettra de vieillir et de se dégrader en même temps que celle qu'il accompagne. Pour faire bonne mesure la cour suprême va enfin lui reconnaître un plein statut humain. Il va donc pouvoir s'éteindre paisiblement juste avant son âme-sœur qui n'a plus aucune raison de s'attarder.

             C'est la fin du film. C'est la fin d'une histoire inventée à l'origine par Isaac Asimov. Fictive autant qu'on veut mais peut-être plus vraie que les infos de notre chaîne favorite. Car la fable peut nous en apprendre long sur ce qu’on n’est pas. Mais ce à quoi l’on croit dur comme fer parce qu’on nous a formatés dans ce but, croire aux vérités conventionnelles rassurantes et aux apparences que nul ne saurait discuter.

                                                                                                                            

                                                                  La Brosse Conge le 17 juillet 2015

                                                                  Copyright Christian Lepère

   

"La tribu" - détail

"La tribu" - détail

"La tribu - détail

"La tribu - détail

A bientôt

pour une nouvelle rencontre

estivale!

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28 juillet 2015 2 28 /07 /juillet /2015 20:37
"Nature morte bien fréquentée" - huile sur toile - 60 x 73 cm - 2001

"Nature morte bien fréquentée" - huile sur toile - 60 x 73 cm - 2001

 

          

Le faisceau de His

suite et fin

 

Enfin l’heure a sonné. On m’amène dans la salle d’examen. Le docteur prévu pour ce faire est surchargé et donc remplacé par un jeune. Le contact est spontané. Il m’explique les misères qu’il va me faire subir à son corps défendant. Il va m’introduire une sonde dans le pli  de l’aine puis la faire remonter jusqu’au cœur. Là une électrode est branchée sur l’oreillette, l’autre sur le ventricule, puis des impulsions électriques vont amener le muscle cardiaque à réagir en s’adaptant à des rythmes imposés. C’est très ingénieux mais l’anesthésie est locale et l’on sent ce qui se passe. Et ça fait des gouzi-gouzi… Les décharges électriques provoquent des sensations supportables mais inquiétantes. Enfin on m’apprend que le résultat final est tout à fait rassurant. La fonction sinusale un peu lente, mais rien d’autre à signaler. Me voilà tout content car ça valait le coup de se soumettre à l’exploration pour en savoir plus.

            On me ramène à ma chambre douillette avec un impératif : ne pas plier la jambe droite jusqu’au lendemain pour que ça cicatrise vite et bien. Je vous épargnerai la suite. J’ai été libéré. D’ailleurs mon voisin de chambre également. Demain la chambre 233 aura d’autres pensionnaires. Avec d’autres maux à soigner, d’autres interventions à pratiquer et des suites dont nous ignorons tout. Comme disent les bouddhistes le cycle du samsara va pouvoir se poursuivre et l’impermanence déployer ses fastes sans cesse renouvelés.

            Toutes formalités accomplies je repars pour la Bourgogne. Je ne sais combien a coûté ce petit intermède à la sécurité sociale mais pour ma part j’ai assumé mon rôle, celui du patient qui patiente patiemment en attendant que la conjoncture évolue suivant ses nécessités propres. Ce qu’elle n’a pas manqué de faire.

            Je vais donc reprendre mes activités habituelles en vous souhaitant un bon été et des vacances agréables. Après tout vous le méritez autant que moi, même si votre faisceau de His remplit sa mission avec diligence et ne nécessite pas de mise en observation un peu poussée.

 

                                                                                                                                                                                              La Brosse Conge le 2 juillet 2015

                                                      Copyright Christian Lepère

"Nature morte bien fréquentée" - détail

"Nature morte bien fréquentée" - détail

A bientôt

pour quelques réflexions 

sur la fiction

plus vraie que nature...

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7 juillet 2015 2 07 /07 /juillet /2015 14:02
"Le songe apaisé" - huile sur toile - 73 x 60 cm - 2.000 -

"Le songe apaisé" - huile sur toile - 73 x 60 cm - 2.000 -

 

      Le faisceau de His

suite       

 

 

              Après Vincelles on quitte la vallée de la Cure qui entre temps s'est jetée dans l'Yonne. C'est par une vaste courbe assez abrupte que l'on remonte sur le plateau pour couper court en direction d'Auxerre. Là le spectacle est grandiose. Le panorama vaste et déployé s'étend jusqu'à l'horizon et sur les pentes en contrebas. Au loin dans la lumière Auxerre se profile dans toute sa gloire, nimbée de passé séculaire et couronnée de clochers et de tours. La cathédrale, d'autres lieux de culte et surtout le moutonnement des toits en vieille tuiles bourguignonnes en forment le centre puis autour, au-delà du boulevard extérieur qui entoure le centre-ville une ceinture de propriétés anciennes aux allures de petits châteaux d'un charme suranné néo -gothique, néo-classique ou patchwork de tout ce qui s'est fait de plus prestigieux au cours des siècles depuis la renaissance ou dans un orient rêvé. Les propriétés sont à l'avenant avec de grands arbres et des massifs de fleurs derrière des grilles en fer forgé dignes de nobles bâtisses.

            Au-delà ça se dégrade. Comme souvent en pareil cas, plus on s'éloigne du centre et plus on se rapproche dans le temps. Plus on devient contemporain. L'esprit n'est plus le même, ni les moyens mis en œuvre. On se paupérise, on se dirige vers la culture de masse. Certes ce n'est pas Sarcelles ni la Grande Borne mais c'est sans doute parce qu'on n'en a pas eu les moyens et que la dégradation sociale n'a pas pu s'épanouir comme autour des villes tentaculaires si chères à Boris Vian.

            Au-delà encore, toujours plus loin, toujours  plus vaste voici maintenant, les zones commerciales avec leurs hyper-marchés, les zones d'activité, les zones industrielles aux noms très pittoresques tels que «  Les Clairions » ou « Les pieds de rats » Le tout cerné, entouré, strangulé par un invraisemblable réseau de voies rapides, de bretelles, de ronds-points multiples et à rallonge conduisant implacablement vers les péages de  l'autoroute, à moins qu'ils ne vous égarent dans des terrains vagues anonymes, encore à aménager ou en voie de bétonnement irrémédiable. Partout des taupinières géantes, des tranchées énormes, des tuyauteries colossales et des amoncellements de sable ou de matériaux qui feraient penser à la dune du Pyla ou au sommet du Ventoux s'ils n'étaient pas aussi urbains, hasardeux et provisoires. Mais Dieu merci on finit par atteindre l'A 6 en direction de  Paris.

 

            Depuis belle lurette le monde suit son cours. Les époques se succèdent et s’alternent suivant la loi inexorable du balancier. Ainsi les progrès de la recherche scientifique aboutissant au pillage des ressources naturelles finissent par tout remettre en cause. Après avoir cru au progrès sans fin et à l’asservissement de la planète à notre bon plaisir, voilà que nos contemporains, qu’ils soient de base ou d’élite commencent à déchanter. Le progrès se retourne contre lui-même et ses effets secondaires sont pervers. Les lendemains qui chantent promis par des idéologies rejoignent les utopies dans le placard à balais des illusions passées. La toute-puissance humaine fait profil bas. Voilà qu’on atteint des limites et que toute nouvelle découverte pose beaucoup plus de questions qu’elle n’apporte de certitudes.

            Comme on pouvait s’y attendre l’irrationnel en profite   pour refaire surface. Sous des formes souvent approximatives et exotiques. Voici donc inévitablement le retour des religions, intégristes ou plus profondes et des sagesses traditionnelles, mais bien souvent comprises de façon simpliste parce que ça nous arrange. Le ras des pâquerettes se porte bien. Il a la cote au hit-parade.

            Une mode est apparue pour se sortir du quotidien et vivre des expériences un peu extrêmes. Ainsi des stages s’organisent pour faire des marches dans le désert. Pourquoi pas ? Et après tout le simple fait de sortir de son train-train et de se soumettre à des conditions inhabituelles peut révéler des aspects profonds du psychisme. Silence et  solitude peuvent être des moments de prise de conscience. Mais pourquoi chercher si loin ?

            Je viens de m’engager sur l’autoroute. Ce long ruban qui serpente dans la campagne bourguignonne et me conduit vers un horizon sans cesse reculé. Le trafic est fluide. Quelques camions venus d’Espagne ou d’Europe centrale ne sauraient faire obstacle. Tout va bien. Ma radio ne marche plus et mes pensées sont plutôt vagues. Je suis donc au désert, sans distraction. Presque seul avec moi-même. C’est-à-dire assez seul. Alors ? Alors les kilomètres défilent. Le temps passe… Tiens ! Où est-il passé ? C’est étrange comme il peut avouer son inexistence dès qu’on lui porte un peu d’attention. Certes quelques pensées me replongent dans des épisodes lointains de l’enfance ou tentent d’explorer un avenir proche mais bien incertain. Curieusement les souvenirs les plus anciens peuvent avoir une grande fraîcheur alors que d’autres encore récents paraissent évanescents. Relativité ? Bien sûr tout est relatif sauf justement la relativité qui elle est absolue.

 

                                                                                                                                                   La prochaine fois la suite du voyage ...

 

"Le songe apaisé" - détail

"Le songe apaisé" - détail

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1 juillet 2015 3 01 /07 /juillet /2015 13:13
"Pays de Cocagne" - huile sur toile - 50 x 61 cm - 1991

"Pays de Cocagne" - huile sur toile - 50 x 61 cm - 1991

Le faisceau de His

Son utilité, ses aléas

 

 

            Je coulais des jours paisibles en Bourgogne. Mais le destin toujours vigilant ne l'entendait pas de cette oreille. J'avais besoin d'être stimulé et il allait faire le nécessaire. Pas de ramollissement ! On resserre les boulons !  Dans ce cas les aléas de santé sont très efficaces. J'ai donc eu l'obligation de réintégrer la région parisienne pour aller subir des examens cardiaques. Cela va m'amener à vous parler du faisceau de His. Totalement inconnu de moi jusqu'à ce jour mais faisant dûment partie de mon équipement biologique et du votre, soyez-en certain, il a pour mission de régler les impulsions électriques du cœur. C'est lui qui nous maintient en vie en faisant de son mieux. Comme tout dispositif organique il a parfois des défaillances. Il lui arrive même de faire preuve d'un manque de sérieux regrettable.

            J'avais donc quelques petits problèmes en plus des extra systoles qui meublent mon quotidien depuis bien longtemps et que l'on traite avec des cachets et des gélules. Ces fantaisies bien que créatives peuvent être jugées peu souhaitables aux yeux d'une personne aussi consciencieuse que la cardiologue qui me suit. Elle m'avait donc conseillé gentiment mais fermement de me soumettre à examen.

            C'est ainsi que par cette belle journée je me suis engagé sur la nationale 6 pour rejoindre l'autoroute. J'ai dit nationale 6 ? Excusez ma négligence. Elle n'existe plus depuis que des directives administratives l'ont transformée en départementale. Pourquoi ? Pour des raisons budgétaires sans doute en ces temps de crise où l'autorité se défile pour faire des économies.

            Ainsi cette voie qui démarrait à Paris et se transformait ensuite en nationale 7 pour atteindre les rivages de rêve de la grande bleue s'est-elle banalisée. Ah ! Il est loin le temps où Charles Trenet le fou chantant chantait joyeusement cette route enchantée qui « Fait d'Paris un p'tit faubourg de Valence et la banlieue d'Saint Paul de Vence ! ». Nostalgie...Nostalgie…

            A ce niveau bourguignon et avant la Puisaye cette ancienne nationale un peu buissonnière remonte vers la capitale en serpentant le long de la Cure qui alimente l'Yonne qui se jette dans la Seine  avant d'aller se perdre dans l'océan avant de dériver vers la lointaine Amérique. La route est assez sinueuse et traverse des contrées verdoyantes et doucement vallonnées. De petits villages anciens et des lieux-dits bordent le parcours. Et c'est une excellente occasion de respecter le code de la route qui nous enjoint de ne pas dépasser les 50 km à l'heure. Tout cela pour le bien des populations riveraines, des enfants des écoles et l'allongement de la durée de vie vagabonde des chiens et des chats.

            C'est donc paisiblement que je traversai les petites agglomérations. Voutenay, Arcy sur Cure, Vermenton, Cravant Bazarnes. Tous ces lieux dont mon frère aîné connaissait la succession exacte à un âge fort tendre, suscitant l'admiration de la famille (Mais où va-t-il chercher tout ça?). C'est que le futur instituteur s'entraînait déjà à classer et répertorier avant de devenir un fanatique de l'identification des automobiles et des autocars d'après leurs plaques minéralogiques. D'un seul coup d’œil il identifiait le véhicule le plus furtif ou le plus véloce, celui qui vous dépasse en sommet de côte, dans un virage  sans visibilité et dans la plus parfaite illégalité. Je me demande pourquoi il n'est pas devenu gendarme, mais les voies du destin sont impénétrables. Il aurait pu aussi se faire des revenus subsidiaires en participant avec brio à des jeux radiophoniques . Hélas une grande timidité et une modestie bien naturelle lui interdisaient toute velléité d'étaler en public ses capacités. A moins que ce ne fut une peur panique de ne pas se montrer à la hauteur…

 

                                                    à suivre...pour atteindre le faisceau de His

 

                                        

"Pays de Cocagne" - détail

"Pays de Cocagne" - détail

"Pays de Cocagne" - détail

"Pays de Cocagne" - détail

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23 juin 2015 2 23 /06 /juin /2015 07:21
 Détail de "Jour de gloire" - huile sur toile - 60 x 73 cm - 1992

Détail de "Jour de gloire" - huile sur toile - 60 x 73 cm - 1992

Waterloo morne plaine

 

               Nous voici donc au 200 ème anniversaire d'une bataille qui a retourné l'histoire comme une crêpe. Après l'ascension fulgurante de l'empereur viennent les déboires. La machine s'écroule, le génie est rattrapé par ses limites et de mesquines contingences vont avoir le dernier mot. Mais rien ne saurait venir à bout de la naïve candeur du mythe. C'est qu'on a besoin de rêver. Puérils et touchants des volontaires nombreux sont prêts à rejouer l'histoire. Méticuleusement documentés ces rêveurs rétroactifs vont pouvoir incarner leur jeu de rôle sur le terrain, en 3 D et avec la bénédiction mercantile des grands médias sous couvert de l'imprescriptible droit à l'information et aux émotions enfantines de la télé réalité.

               Tout y sera. Les uniformes, les armes, les reconstitutions de mouvements de foule et pour superviser le tout l'Empereur en personne, avocat dans la vie ordinaire, plein d'autorité débonnaire et un peu enveloppé comme il se doit. Voilà où nous en sommes. Voilà comment on nous informe.

               Par soucis d'équité on donne la parole aux à ceux qui sont pour et à ceux qui sont contre. On interroge des historiens qui nous en apprennent de belles. Turlupiné par ses hémorroïdes l'Empereur ne saurait caracoler à son aise. Trahi par son fondement il doit faire avec. Peut-être aussi son merveilleux ordinateur cérébral qui jusque-là dominait la situation et survolait le champ de bataille commence-t-il  à avouer ses limites et à renâcler des neurones. C'est bien connu, le computer le plus performant est à la merci des virus que des sournois lui introduisent frauduleusement. Ainsi de petits grains de sables s'immiscent  et finissent par former des dunes où la vaillance la plus virile finit par pédaler dans la semoule.

               Pourtant l'artillerie du héros était redoutable, la meilleure de son époque et la plus meurtrière. Mais l'ennemi ne jouait pas franc jeu. Au lieu de se présenter en ligne pour se faire massacrer, comme on faisait entre gens bien élevés, voilà qu'il s'était planqué derrière un repli du terrain, pourtant négligeable dans cette morne plaine. Technique d'évitement digne de lâches qui n'assument pas leur rôle de faire-valoir et veulent bêtement gagner à tout prix. Par des subterfuges et sans noblesse véritable, ne reconnaissant pas le génie, ils l'ont humilié en faisant feu de tout bois. Ils ont vaincu mais petitement.

               L'Empereur a donc failli. Le surhomme s'est fait avoir. Le destin avec ses moyens discutables ne l'a pas épargné. L'a pas eu de chance. Et c'est pas juste ! Mais qu'importe la légende continue de fasciner et Napoléon reste grand dans la défaite. Le mythe perdure et l'éclat posthume de l'enfant prodigue de la gloire continue de nous réchauffer l'âme. Cependant Je n'ai qu'un regret, mais il est de taille. Pourquoi a-t-il fallu que Léon Zitrone ne soit plus de ce monde. Lui au moins aurait su commémorer cet événement sublime avec tout son poids  et toute sa ferveur. Lui au moins aurait su faire exploser l'audimat et nous procurer de délicieux frissons dont nous aurions conservé un souvenir attendri et rayonnant. Mais le monde n'est pas si bien fait et d'ailleurs on le sait bien ce sont toujours les meilleurs qui partent les premier ne nous laissant qu'avec le tout-venant

 

                                                                     La Brosse Conge le 22 juin 2015

                                                                     Copyright Christian Lepère      

 

 

         

 

                     

Détail de "Jour de gloire"

Détail de "Jour de gloire"

Demain sera un autre jour

en attendant

portez

vous

bien

!

!

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16 juin 2015 2 16 /06 /juin /2015 06:48
"La vraie vie est ailleurs" - huile sur toile - 61 x 50 cm - 1991

"La vraie vie est ailleurs" - huile sur toile - 61 x 50 cm - 1991

Les beaux jours

 

         Par ce beau jour de juin mon âme était en peine et mon cœur en déshérence. Non qu'il y eut quelque raison pratique à cela. En fait tout allait pour le mieux. Les finances étaient prospères et mon assiette était garnie, pleine de bonnes choses choisies avec soin au super marché voisin.

             Sur le plan humain les voisins étaient agréables, discrets et prêts à coopérer si on leur en offrait l'occasion. Par ailleurs ils n'avaient ni passions équivoques ni exigences déraisonnables. Une cohabitation de bon aloi était donc envisageable.

             Même le temps y mettait du sien. Beau et ensoleillé mais sans excès. Un petit vent nord-est venait revigorer ce qui aurait pu devenir étouffant. La terre n'était pas sèche. La végétation pouvait croître tout à son aise et les pissenlits ne s'en privaient pas.

             Tout cela était bel et bon et nulle personne sensée n'aurait pu souhaiter que les choses fussent différentes. Mais, allez donc savoir pourquoi, mon âme était en peine et mon cœur se languissait en vain. Comme si tout ce qui était offert, bien que très estimable, s’avouait tout à fait insuffisant.

             Derrière et par-delà autre chose se laissait espérer. Toute distraction paraissait vaine. Par exemple la musique, même la plus suave ou la plus gravement déjantée, hard-rock ou nostalgique balade irlandaise à la Lennon. Également La littérature, même la plus riche en subtilités et péripéties pour polar frénétique. Quant à la télé avec ses mièvreries racoleuses et sa violence démagogique cernée de publicités ineptes pour consommateurs infantiles et fiers de l'être, toute cette sauce culturelle d'un modernisme immédiat révélait sa vacuité, avouait son indigence.

             Donc pas d'échappatoire. Pas d'issue de secours. Et pourtant ! Il y a de ces moments où l'on sent bien que rien ne pourrait suffire. Que par-delà les collines il y a d'autres collines et d'autres espaces et de mystérieux lointains. Le monde ne s'arrête pas après le hameau, ni même au-delà du pont. Il va plus loin...Plus loin...Bien plus loin encore...Et malgré tout il est si proche, si mitoyen qu'on se demande pourquoi y aller voir pour se retrouver soi-même. Comme si l'on s'était perdu de vue.

 

                                                  La Brosse Conge le 10 juin 2015

                                                                        Copyright Christian Lepère

"La vraie vie est ailleurs" - détail

"La vraie vie est ailleurs" - détail

Prene bie soin  de  vous

en attendant!

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9 juin 2015 2 09 /06 /juin /2015 08:05
"Le temps qu'il fait" - huile sur toile - détail - 1993

"Le temps qu'il fait" - huile sur toile - détail - 1993

LES MERVEILLEUX NUAGES

 

     Après les temps maussades et incertains, voici que gorgée d’eau la végétation s’épanouit à nouveau. Sur la route qui serpente entre vals et vallons conduisant à Vézelay tout rayonne, tout vibre calmement. La nature paisible exulte. De grands nuages passent nonchalamment. Escaladant les hauteurs prodigieuses de leurs masses arrondies, les poussant et les étirant, le vent façonne des formes barbares, si douces ou si heurtées, passant de l’ineffable au brutal, crevées de déchirures. La lumière les transperce avant d’exploser en scintillant sur leurs crêtes échevelées. Mais pour eux peu importe, ils passent dans leur splendide indifférence, moutonnants et paisibles, abandonnés au fil du temps qui passe. « Elle est retrouvée. Quoi ? L’éternité… » . Mais pourquoi l’avait-on perdue ? La question se pose.

     Un peu plus- bas les affaires des hommes suivent leur cours. Indifférent à la merveille d’être sous un ciel glorieux, Le touriste s’affaire ou trainaille. Chacun vaque à ses obligations. Pour beaucoup celles-ci se résument en ce moment à venir visiter les lieux. Trois étoiles sur le guide Michelin méritent certainement un détour. Et puis on mange bien par ici et les vins y sont pleins d’esprit. Du moins on l’assure pour pouvoir rigoler à son aise, sans avoir honte, entre copains. La Bourgogne est une terre d’accueil où on sait vivre, cré vingt dieux !

 

                                                  Sermizelles  le 18 aout 1994

                                                  Copyright Christian Lepère

"Le temps qu'il fait" - détail

"Le temps qu'il fait" - détail

Affaire à suivre...

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2 juin 2015 2 02 /06 /juin /2015 06:56
"Dies irae" - huile sur toile - détail - 2003

"Dies irae" - huile sur toile - détail - 2003

Haute sécurité

 

           Un peu las, j'ouvre la télé pour avoir des nouvelles du vaste monde. Comme à son habitude il n'arrête pas de se convulser. Partout ce ne sont qu'affrontements violents et fanatiques. Des armes légères aux matériels de destruction massive les plus performants et imparables tout est employé pour compléter les moyens humains biologiques. Ceux-ci sont notoirement insuffisants pour assouvir les passions.

           Las de s'arracher les cheveux et de se griffer avec leurs ongles tels des donzelles jalouses défigurant leur meilleure amie au prétexte qu'elle a séduit le copain de la copine qui ne lui avait pourtant voulu que du bien, les fanatiques de tous les camps s'arment de leurs prothèses guerrières favorites.

           Après le cran d'arrêt puis la baïonnette qui vous éventre prestement et avec élégance si on la manie avec conviction, on est passé aux armes à feu. Avec l'avantage du tir tendu instantané et la précision du viseur. D'abord on peut lorgner de loin et gagner en ouverture panoramique et puis on peut se planquer derrière les poubelles. Ou bien au milieu des décombres où l'on espère toujours être à l'abri de stupides représailles. C'est un grand jeu de cache-cache et de pas vu pas pris. Mais le coup par coup est bien désuet, le tir par rafales vous a une autre efficacité. On peut enfin nettoyer les lieux plus vastes où des foules se rassemblent pour protester. On peut faire des tirs de barrage. On peut même avec une bande de copains cerner de plus vastes populations et prendre ses aises pour les terroriser. Merci à monsieur Kalachnikov qui a démocratisé le tir par rafales. Mais le progrès ne cesse d'améliorer les moyens d'intervention. Maintenant toutes les armes peuvent être embarquées et à partir d'un hélicoptère suréquipé on a l'avantage de surplomber la situation et les pires irréductibles. Évidemment on est aussi plus visible et bêtement privé d'abris. On se surprendrait à regretter le bon vieux temps des pont-levis et des remparts. C'est qu'alors on pouvait jeter de l'huile bouillante et du plomb fondu sur des assaillants exaltés gesticulant en haut de leurs échelles d'assaut et les bouter prestement au fond des douves. Au moins ils pouvaient s'y rafraîchir avant de  périr noyés. A moins que la sainte Vierge ne les ai pris en pitié. Pêcheur repenti est déjà pardonné ! Il pourra derechef repartir à l'assaut pour faire triompher sa juste cause !

           Mais nous n'en sommes plus là. Les forces aériennes, rapides et furtives lancées en rase-motte peuvent répandre du napalm et nettoyer toute la vermine sur d'assez grandes superficies. Leur efficacité est comparable à celle de modernes exploitants agricoles arrosant largement d'insecticide les étendues qu'ils ont mission de faire fructifier. Pour ce faire ils ont d'abord à supprimer tout ce qui vole, rampe ou nage et ne songe qu'à se goinfrer des graines, puis des jeunes pousses, puis des récoltes. Donc, place nette. Ensuite les bonnes plantes pourront s'épanouir sans entrave. Hélas ! Rien n'est parfait. D'autres prédateurs vont apparaître. Tout ce qui est radical ne saurait être définitif. Car la nature est inlassable et pleine de ressources. Les biologistes l'ont bien noté et s'en inquiètent. Après usage de tout antibiotique des mutations nombreuses et aléatoires vont faire apparaître bien vite de nouvelles souches de germes qui ont su faire la nique à ceux qui voulaient leur faire des misères !

           Il me semble d'ailleurs qu'on en est au même point avec les virus informatiques. Les anti-virus ont encore un bel avenir devant eux. D'ailleurs comme dans n'importe quelle guerre il y a des camps qui s'opposent honnêtement, je veux dire de manière frontale. Mais en sous-main fourmille tout le reste. Les services d'espionnage, de contre-espionnage, les bureaux secrets d'infiltration, les pros, les para, les anti-contres, les parallèles bien qu'affiliés. Et tout cela pour d'insidieuses et obscures raisons. N'oublions pas les trahisons et les retournements de veste.

           On peut donc supposer que les spécialistes les plus pointus dans la lutte anti-virus, capable de vous concocter sur demande de nouveaux espions informatiques particulièrement retors ne vont pas s'arrêter là. Et leurs adversaires non plus. D'ailleurs la nature humaine étant ce qu'elle est, si les grands bandits font les meilleurs policiers parce qu'au moins ils savent de quoi il retourne, les experts aussi peuvent changer de camp, voire jouer dans les deux simultanément !

           Tout cela est certainement très lucratif. Mais tant que l'on voudra préserver ce qui nous tient à cœur il faudra négocier. Mais au fait, qu'est-ce qui nous tient à cœur ?  Ce qui nous intéresse ? Ce qui nous motive ? Ce qui nous tient lieu de moteur ? A chacun de répondre. Et c'est à partir de cette évidence tout à fait personnelle et sans doute incompréhensible pour d'autres que nous allons nous opposer à ceux qui ont l'idée saugrenue de ne pas être d'accord. Et qui ont tort évidemment.

           Dans ces conditions il est certain que la guerre de Troie aura bien lieu. Comme nous l'a si bien expliqué Jean Giraudoux dans sa pièce célèbre et tristement prémonitoire de la seconde guerre mondiale. Elle aura lieu envers et contre toute  hésitation parce que tout y conduit et que tout ce qui s'y oppose est purement velléitaire. L'enfer est pavé de bonnes intentions ! Mais elles sont sous le contrôle des autres...

           Mais je vous semble peut-être un peu pessimiste. Allons ne nous inquiétons pas trop. Mai se termine. L'été va déployer ses fastes. Et avec tout cela nous regarderons peut-être un peu moins la télé et un peu plus les fleurs des champs.

 

                                                               la Brosse Conge le 27 mai 2015

                                                               Copyright Christian Lepère

"Dies irae" - détail

"Dies irae" - détail

"Dies irae" - détail

"Dies irae" - détail

Dormez en paix braves gens!

Tout est sous contrôle!

Et les méchants

seront punis.

Youpi!

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26 mai 2015 2 26 /05 /mai /2015 07:11
"Le petit train" - huile sur toile - largeur 51 cm - 2006

"Le petit train" - huile sur toile - largeur 51 cm - 2006

Le petit train sifflette

 

Un train sifflette le cœur en fête

crapahutait au long des voies.

C'était un train qui mine de rien

suivait sans fin les aléas

de son destin.

 

C'était un petit train branlant

tout cahotant et tressautant

qui sans y voir ni mal ni bien

      suivait ses rails avec entrain

ne sachant pas improviser

ni changer la suite à venir.

 

 

         Bien sûr de temps à autre la voie se faisait plus raide ou un peu moins large, toute encombrée qu'elle était par les multiples débris qui souillaient son parcours. C'est qu'une voie a bien des problèmes. D'abord elle a été conçue. Son parcours a été décidé  soit par un ingénieur des Ponts et Chaussées, soit par son commis, soit même et par soucis d'économie par le recours à l'animal. Âne ou mulet dans les cas où le projet d'intérêt très local n'avait pu être financé au-delà des possibilités communales voire intercommunales  dans le cadre d'une coopération.

         La voie semblait donc un peu capricieuse. C'est qu'elle n'allait pas automatiquement au plus court quand celui-ci aurait exigé des solutions techniques fort onéreuses. Des ponts pour franchir des ravins, des tunnels pour se faufiler sous la roche, des tranchées pour passer à tout prix à ciel ouvert comme au bon vieux temps du far-West. Et puis la voie se devait d'être à peu près plate, un petit train sans crémaillère ne sachant se hisser sur des rails dangereusement lisses au-delà d'une modeste pente.

 

 

Le train sifflette allait donc là

où le vent le poussait sans fin.

Il cheminait et sans s'en faire

Salué par la garde-barrière.

 

Fort délurée cette dernière

agitait sa main potelée

et le petit train suranné

un peu ému passait tout fier.

 

Sûr de son fait, de sa coutume

il n'innovait ni ne changeait.

Jamais ne se serait permis

de ne pas suivre son circuit.

 

C'était un petit train sifflette

et depuis des éternités

il allait le cœur en goguette

au fond des bois et des sentiers.

 

 

         Mais la pente se fait plus rude et des éboulis menacent l'intégrité du parcours. Partout ce ne sont que ronces qui se propagent et que folles orties parsemées de scabieuses. La menthe répand son doux parfum et parfois une fraise des bois pousse son petit cri rouge entre de grosses touffes d'herbes folles.

         Mais le petit train n'en a cure. Il connaît son devoir, il sait qu'il doit aller. Sans impatience, avec détermination. Certains diraient qu'il est casanier ! C'est un point de vue défendable mais qui porte un jugement péremptoire. Alors…

 

 

Laissons-le à ses habitudes.

Ne le forçons à ralentir

en nous mêlant d'intervenir

avec toute notre inaptitude.

 

 

Si des enfants à bicyclette

s'en vont en longeant son chemin

et en lui faisant des risettes

il sourit et leur veut du bien.

 

 

C'était donc et depuis longtemps

un petit train tout patachon

qui sentait bon le liseron

la noisette et les fleurs des champs.

 

 

         Je n'en dirai pas plus sur ces parcours sans cesse renouvelés. Je n'en dirai pas moins non plus car l'histoire est indéfinie et que sans arrêt elle redémarre à chaque halte, au détour de chaque coteau en suivant les contours sinueux de la vallée. De ressaut en rebond, d'arrêt en prudent redémarrage notre petit train crache les résidus de ses noirs poumons. Il n'est pas très écologique. Mais que voulez-vous c'est de son âge ou, pour le moins, de la génération de ses concepteurs qui n'y voyaient malice. A une époque où la pollution artisanale savait rester bon enfant. A moins qu'elle ne vous prît à la gorge au beau milieu d'un tunnel…

         Mais là c'était pas de chance et personne n'aurait pu supposer que soixante ans plus tard il put y avoir des suites d'une gravité fort ennuyeuse pour toute personne soi-disant élevée au grand air des Cévennes. A moins que ce ne soit dans une autre partie hexagonale de notre France profonde.

 

 

                                                              Le Chesnay le 26 avril 2015

                                                              Copyright Christian Lepère

 

 

 

 

 

"Le petit train" - détail

"Le petit train" - détail

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