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28 octobre 2014 2 28 /10 /octobre /2014 13:17
"Par un beau soir d'automne" - dessin aquarellé - 30 x 42 cm - 1984

"Par un beau soir d'automne" - dessin aquarellé - 30 x 42 cm - 1984

Endormissement

 

               En général on n'en est guère conscient. Le corps un peu las, l'esprit repus des complications quotidiennes, on est bien aise de se laisser sombrer pour retrouver son innocence. A condition bien sûr qu'une fatigue excessive ne provoque par contrecoup des tumultes intérieurs. Car dans ce cas l'affaire se corse. Toute la chimie interne est perturbée et l'on ne saurait se libérer tout bonnement des toxines qui saturent notre physiologie la plus intime.

               Des souvenirs surgissent sans crier gare. Ils entraînent des pensées qui tournent en rond et prolifèrent à qui mieux mieux. Le scénario s'auto-entretient de lui-même dans un délire plus ou moins logique mais dont les enchaînements mécaniques sont implacables.

               C'est universel et bien connu de tous. A chacun d'y reconnaître ses fantasmes et ses préoccupations. Pour certains, tonton Gustave devrait gagner au loto car il le mérite bien en tant que cheminot retraité. Par ailleurs  le retour de Sarkozy leur fait chaud au cœur ou bien suscite au contraire un profond rejet, selon affinités.

               Mais il arrive aussi que l'endormissement se fasse de façon plus douce. La fatigue est bien présente, sinon pourquoi s'endormir ? Le besoin de se régénérer est impératif. Mais de façon naturelle il se trouve qu'on est d’accord. Est-ce la satisfaction du devoir accompli ? L'absence de regrets et de remords ? Toujours est-il que la transition peut se faire en douceur. On est prêt à se laisser dorloter dans les bras de Morphée.

               Dans cet état tout peut se passer très vite, presque aussi vite que si un anesthésiste nous prenait en main et décidait de suspendre le cours de notre devenir.

               D'autres fois c'est plus nuancé. D'abord les pensées s'apaisent. Ne reste plus que la rumeur vague des sensations corporelles. La conscience peut s'épanouir au lieu de se crisper sur ce qui la préoccupe. Les conditions sont bonnes, l’occurrence favorable. Alors d'autres zones du cerveau s'activent, d'autres états psychiques se font jour. Même les plus cachés dans les sombres replis du mental ordinaire. A ce moment « Moi-Je » commence à s'étioler. Il avoue son imposture et lâche ses prétentions à être seul maître à bord. Il admet qu'il n'est pas tout à fait le  « héros de l'histoire » mais un simple figurant. Ni plus, ni moins.

               Voilà maintenant que dans des états crépusculaires, délicieux ou inquiétants , il devient évident que « ça pense » et que des films de différents genres sont prêts à faire irruption, n'attendant que le moment propice pour déployer leurs extravagances comme ces publicités abusives qui viennent couper en son milieu le match de foot ou le débat sur les taxes surajoutées pénalisant de modestes citoyens.

               Avec un peu de chance nous allons assister à un déferlement d'images hypnagogiques, déploiement saugrenu d'hallucinations tissées par nos neurones qui se croisent les synapses. Cela va du paysage se précipitant derrière la vitre du t.g.v. ou derrière le hublot du Boeing survolant le cap Corse à des jeux de formes et de couleurs plus abstraits. Mouvance des flots dans des criques obscures, écoulements de lave flamboyant au cœur de la nuit tropicale. Ça se rapproche de l'abstraction pure et ça tend même à se réduire à des jeux de lignes, d'angles et de surfaces d'une créativité ludique qui ferait pâlir d'envie le peintre le plus abstrait. Surtout s’il oubliait que le non-figuratif pur est un leurre car tout est dans le répertoire inépuisable de la nature. Voilà qui mérite réflexion.

               Mais il arrive aussi qu'il n'y ait plus que de la lumière, des radiations, des aurores boréales qui palpitent dans des espaces infinis pour finir parfois par se réduire à un simple point lumineux. Un point ? Un point c'est tout, comme dirait le bon sens populaire. Sans en arriver là on peut s'arrêter au jeu de nappes colorées qui ondoient dans des nuances diverse mais avec souvent ce violet magique qui est selon les ésotéristes un signe d'activité du troisième œil, point particulier entre les deux sourcils. Il lui arrive alors de  vibrer discrètement quand il sert de portail d'accès à la glande pinéale blottie au cœur du cerveau.

               Il se peut aussi que formes humaines et animales se mélangent en créant d'improbables assemblages tératogènes. Alors ce ne sont qu'anatomies convulsées se déformant sans cesse car la principale caractéristique de toutes ces visions est leur mouvance. Leur absence totale de fixité. Comme ces écrans d'attente d'ordinateur où des poissons rouges tournent en rond dans le rectangle de l'écran.

               Mais il peut se produire de l'encore plus étrange. Des scènes complexes peuvent être vues sans distorsions optique et sans effet de zoom avant ou arrière. Mais ces visions classiques n'excluent pas des fantaisies visuelles un peu plus rares. Il m'arrive parfois d'assister à des sortes de représentations théâtrales vues par le petit bout de la lorgnette. Des personnages minuscules mais d'une grande précision s'y adonnent à des activités diverses et c'est souvent très coloré. C'est un peu comme assister à une séance de marionnettes. Mais je vous parle de ce qui est peut-être une caractéristique assez personnelle. Nul doute que chacun étant un cas particulier, il puisse se faire que ce qui orne vos songes ne soit pas de mon domaine.

               Alors je vais vous laisser à vos rêves  en vous souhaitant, comme diraient nos amis allemands : « Träumen sie süss ! »  (Rêvez sucré!). En attendant portez-vous bien !

 

                                                    Le Chesnay le 21 octobre 2014

                                                    Copyright Christian Lepère

 

 

La prochaine fois ?

 

Le futur est incertain comme le temps qu'il fait...

Laissons l'avenir venir...

Il connaît son métier!

"Virage dangereux" - dessin aquarellé - 30 x 42 cm - 1984

"Virage dangereux" - dessin aquarellé - 30 x 42 cm - 1984

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